Educ Stud Math (2008) 68:55–80 DOI 10.1007/s10649-007-9108-y
Analyses de séances en classe et stabilité des pratiques d’enseignants de mathématiques expérimentés du second degré M. Pariès & A. Robert & J. Rogalski
Published online: 5 April 2008 # Springer Science + Business Media B.V. 2007
Abstract In this paper we tackle the issue of an eventual stability of teachers’ activity in the classroom. First we explain what kind of stability is searched and how we look for the chosen characteristics: we analyse the mathematical activity the teacher organises for students during classroom sessions and the way he manages the relationship between students and mathematical tasks. We analyse three one-hour sessions for different groups of 11 year old students on the same content and with the same teacher, and two other sessions for 14 year old and 15 year old students, on analogous contents, with the same teacher (another one). Actually it appears in these two examples that the main stabilities are tied with the precise management of the tasks, at a scale of some minutes, and with some subtle characteristic touches of the teacher’s discourse. We present then a discussion and suggest some inferences of these results. Keywords Teachers’ activity . Teacher’s discourse . Students’ activity in the classroom . Stability of teacher practices
1 Introduction 1.1 Le problème abordé A partir de l’analyse d’une séance en classe d’un enseignant de mathématiques, peut-on déduire légitimement des éléments sur ses pratiques susceptibles d’être retrouvés dans d’autres séances ou d’autres classes, toutes proportions gardées? On parlera de stabilité des pratiques pour qualifier l’existence de telles invariances: il s’agit de chercher dans quelle M. Pariès (*) : A. Robert Equipe Didirem, Université Paris 7, 2 Place Jussieu, 75005 Paris, France e-mail:
[email protected] A. Robert e-mail:
[email protected] J. Rogalski Laboratoire Cognition et Usages, Université Paris 8, Paris, France e-mail:
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mesure les déroulements observés, analysés en relation avec les activités mathématiques provoquées chez les élèves sont analogues (évidemment jamais identiques). La stabilité de l’enseignement comme associée à un enseignant individuel est certes largement postulé et raisonnable mais peu testé. Nous cherchons à affiner cette notion en précisant à quel(s) niveau(x) elle se situe et sur quel(s) niveau(x) on peut agir. Les enjeux des recherches sur ce sujet sont de deux ordres au moins. D’une part, les activités des élèves et leurs apprentissages dépendent vraisemblablement de facteurs liés au temps long, repérables par ces invariances: par exemple, les répétitions dans les choix de l’enseignant, y compris ce qui n’apparaît jamais. Il n’est pas exclu que certaines activités pour les élèves ne soient pas compatibles avec certaines pratiques; elles ne pourraient être développées « quand même » par les enseignants concernés que moyennant des changements d’autant plus coûteux que les pratiques sont plus stables. 1.2 Les cadrages théoriques Quelles analyses des séances et des pratiques des enseignants de mathématiques en classe avons-nous adoptées? Avant de développer la réponse à cette question, rappelons que ce sont les apprentissages mathématiques des élèves, et leurs relations avec les enseignements correspondants, qui constituent la visée finale de nos recherches didactiques. Pour y avoir un accès, même différé, permettant cette mise en relation avec ce que l’enseignant propose, nous avons choisi d’étudier un intermédiaire en partie observable: les activités des élèves en classe. En fait, nous adoptons le cadre de la théorie de l’activité issue de Léontiev (1976), cadre que nous adaptons aux mathématiques et à la situation scolaire (cf Christiansen and Walther 1986): les activités des élèves, surtout en classe, sont étudiées en relation avec les connaissances mathématiques qu’elles peuvent « engendrer » à terme. Y participent tout ce que font les élèves, y compris l’écoute, mais aussi ce qui est « autour », ce qui va permettre le développement de connaissances à partir des actions. Les activités des élèves font intervenir ce que les élèves font, ne font pas, disent, ne disent pas, ou même peuvent penser même si c’est inaccessible à la seule observation. Elles sont conditionnées par bien des facteurs, dépendant plus ou moins de l’enseignant, dont nous ne retenons ici, comme contribuant aux transformations espérées en termes de connaissances, que les cours et les exercices proposés aux élèves ainsi que les conditions de travail organisées en classe. A cet effet nous dégageons, à partir de nos observations en classe, les tâches proposées aux élèves (analyses a priori) et des caractéristiques du déroulement des séances (analyses a posteriori). Les autres déterminants de l’activité, et partant des apprentissages des élèves, (facteurs affectifs, facteurs socio-culturels, éléments liés à la conjoncture...) sont considérés comme des paramètres. Les contenus mathématiques en jeu dans les activités proposées aux élèves sont étudiés dans le cadre de la didactique des mathématiques: après avoir reconstitué les caractéristiques de la notion visée, tant mathématiques que liées aux programmes, nous détaillons les tâches précises proposées aux élèves a priori. Cependant dans le travail présenté ici, nous nous centrons sur des séances de classe (temps court) et nous ne développons que les analyses de tâches correspondantes sans les resituer dans un ensemble plus vaste. Les activités des élèves, telles que nous les étudions, sont aussi largement conditionnées par la gestion de la classe, organisée par l’enseignant, tout au long du déroulement de la séance: ici nous rejoignons ce qui est utilisé par exemple dans Henningsen and Stein 1997. En effet, les activités attendues sont modelées à partir des tâches proposées par la forme et la nature du travail provoqué, le temps imparti aux élèves dans les différents moments, les
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contenus des diverses interactions qui ont lieu. Des analyses didactiques a posteriori permettent le suivi de ces tâches pendant le déroulement des séances et contribuent à définir les activités mathématiques possibles des élèves. Ces analyses sont globalement proches de certaines analyses proposées dans Steinbring et al. 1998. Précisons le niveau d’analyse des connaissances à utiliser dont nous avons besoin dans les tâches à réaliser par les élèves. Selon les adaptations des connaissances à mettre en œuvre, les élèves travaillent différentes manières de les utiliser en mathématiques, ou même approchent de la raison d’être de ces connaissances en relation avec les questions posées dans les exercices qu’ils résolvent. Par exemple, reconnaître les modalités d’application d’un théorème, ne provoque pas les mêmes activités sur ce théorème que l’appliquer en introduisant un autre domaine de travail ou en introduisant un intermédiaire. Dans le premier cas, sachant que c’est ce théorème qu’on va appliquer, on essaie de faire coller ce qu’on sait et ce qu’on cherche; il y a un travail de reconnaissance (y compris de forme), de mise en regard. Cela pourrait contribuer à faire acquérir la connaissance du théorème d’une part parce qu’il sert (argument quantitatif), d’autre part parce qu’il faut un peu le faire bouger, et donc se pencher davantage, faire plus attention aux notations, aux hypothèses, etc. On n’est pas seulement dans une routine; il y a une véritable activité nouvelle, peut-on espérer, qui permet de mieux appréhender comment appliquer le théorème. Si on doit introduire un travail algébrique dans l’application d’un théorème géométrique, on se décentre un moment de la connaissance visée, on ajoute un autre travail qui n’est pas lié de manière linéaire au travail précédent, on doit même le mémoriser temporairement, et le reprendre: il y a une activité différente pour travailler sur deux choses à la fois, même en décalé, qui donne un accès à la différence des deux, à ce que peut être l’une par rapport à l’autre. S’il y a à introduire un intermédiaire, il faut prendre des initiatives, combler un vide, imaginer, créer quelque chose. On peut être amené à remonter à l’envers pour repérer ce qui manque. On commence à jouer sur le sens: on a un « besoin », on lui associe un outil, y compris une notation à introduire qui focalise l’attention sur un point jusque là « anonyme », inutilisable... Enfin, si une connaissance doit être disponible pour être utilisée, c’est encore plus sur le sens qu’on joue, sur le « pourquoi » et l’association d’un type de question ou de tâche et d’un outil. Les activités mathématiques associées à des tâches différentes sont susceptibles de provoquer la construction ou l’amorçage de connaissances. Il faut tenir compte aussi de « l’âge des connaissances », anciennes, récentes, nouvelles, du fait du caractère cumulatif des mathématiques. Si des liens (légitimes, associés à des champs conceptuels) sont élaborés entre connaissances y compris d’âges différents, cela permet à la fois qu’elles disparaissent moins, qu’elles restent « accrochées » à quelque chose, qu’elles soient « retenues », et qu’elles se développent mieux, servant à leur tour d’accroche à du nouveau. Cela rejoint l’idée de ZPD de Vygotski. C’est ainsi à la fois les tâches associées aux énoncés proposés par l’enseignant, la nature du travail demandé au cours de la séance et ses aides qui peuvent contribuer ou non au développement des connaissances. Les analyses de déroulement sont fortement déterminées par les analyses de tâches puisqu’elles servent à préciser les activités que les élèves peuvent développer en classe sur ces tâches, compte tenu de ce que l’enseignant organise. Encore faut-il que les élèves réussissent à adopter une posture compatible avec ces activités, notamment en acceptant de sortir un peu de la seule visée de production de
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résultats et d’obtention de notes, aidés en cela par l’enseignant. Cependant nous ne prenons pas en compte ce paramètre dans nos analyses. Soulignons que nous n’avons en général pas accès aux activités effectives des élèves en classe mais seulement à leurs activités possibles: nous ne pouvons pas être sûrs que les élèves aient fait ce qui est proposé, que nous délimitons au plus près possible, à partir des observables recueillis en classe. D’ailleurs nous distinguons assez facilement des activités (possibles) a maxima, celles des élèves qui démarrent dès que le professeur demande quelque chose et des activités (possibles) a minima, celles des élèves qui attendent le dernier moment pour se mettre au travail, suivant des injonctions comme celles de recopier le tableau. Nous n’avons pas appelé ces activités possibles « activités potentielles », alors que c’est bien de cela qu’il s’agit, pour ne pas risquer une confusion avec les activités que les élèves peuvent faire avec l’aide d’un adulte et pas tout seuls (selon l’approche de la « Zone Proximale de Développement » de Vygotski). Cependant, et nous allons revenir à notre question initiale, ces analyses didactiques ne permettent pas de repérer des régularités fines dans la conduite de la classe, tenant aux visées, y compris implicites, de l’enseignant, voire à ses conceptions, ni d’interpréter les raisons des choix des enseignants ni, de ce fait, d’inférer des régularités sur le temps long. C’est le besoin d’intégrer des éléments de ce type aux activités des élèves, dont nous pensons qu’ils contribuent à les définir, qui nous a conduites à introduire des analyses de pratiques de l’enseignant, ce « maître » des déroulements et du choix des tâches, et à emprunter à cet effet des éléments du cadre de la psychologie ergonomique (Robert and Rogalski 2002, 2005). De ce point de vue, on considère l’enseignant comme gérant un environnement dynamique particulier, à savoir le rapport entre les élèves et le savoir mathématique (Rogalski 2003). Nous nous situons toujours dans le cadre de la théorie de l’activité. Ce cadre intègre des régulations multiples de l’activité de l’enseignant par des composantes personnelles et par les caractères de la situation de travail dans laquelle il agit. Ces dernières déterminent en particulier un ensemble de contraintes épistémologiques, institutionnelles, collectives et sociales) qui peuvent jouer dans la gestion même de la classe (Robert and Rogalski 2002; Robert 2006). Les activités de l’enseignant, sur le temps court, analysées dans ce travail comprennent la prescription des tâches au cours d’une séance et la régulation de l’activité des élèves plus ou moins engagés dans la réalisation de la tâche donnée par l’enseignant. Du point de vue de la gestion des activités mathématiques des élèves, ces activités s’organisent autour de trois grands buts: « enrôler » les élèves de la classe dans la réalisation des tâches qu’il leur donne, c’est-à-dire à la fois les placer et les maintenir dans leur posture d’élève, tout au long de la séance, assurer la dévolution des tâches (Robert and Rogalski 2005) et agir sur leur activité même de réalisation de ces tâches, y compris grâce à l’évaluation. Ainsi notre entrée dans les analyses des pratiques en classe est complètement pilotée par l’analyse didactique des tâches en face desquelles l’enseignant place, à chaque instant, les élèves. Ce point de vue est tout à fait différent de celui de Lemke (1993) qui s’attache à l’enseignement des sciences, qu’on peut élargir aux mathématiques, en tant que « processus social et culturel »; c’est le type d’organisation de l’interaction sociale qui conduit, en particulier, à la détermination de l’ensemble des « types d’activités » relatif à la coopération sociale. Bien entendu, certaines catégories peuvent se retrouver. De notre point de vue, les modes d’action de l’enseignant en classe relèvent de deux dimensions: une dimension cognitive de ce qui est en jeu dans la relation élèves/savoir, avec la détermination de l’« itinéraire cognitif » proposé aux élèves de la classe (Robert and Rogalski 2005), et une dimension médiative, de l’action de l’enseignant sur les élèves à
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travers la communication: le discours enseignant mais aussi l’écrit du tableau et les représentations diverses sur d’autres supports.1 En effet, une propriété cruciale de l’enseignement est le fait que la visée de transformation concerne des sujets humains. Les moyens d’action impliquent fortement l’interaction entre l’enseignant et les élèves. Le mode d’action de l’enseignant est à la fois indirect à travers les tâches proposées, et direct au sens où l’enseignant est de sa personne un de ses instruments d’action (Rogalski 2003). Le discours de l’enseignant dans la classe peut alors être considéré et analysé comme un instrument de son activité didactique (Rogalski 2006). La pragmatique apparaît ainsi comme un cadre consistant avec l’ancrage dans la théorie de l’activité et le modèle de gestion d’un environnement dynamique humain. Les fonctions du discours « permettent de différencier des relations entre la tâche proposée [par l’enseignant] et les activités possibles attendues [des élèves] », les buts illocutoires « indiquent ce que cherche à produire le contenu du discours » (Chappet Pariès 2006) ainsi que la position respective de l’enseignant et des élèves par rapport aux objets mathématiques de la tâche. Ainsi, pour étudier les pratiques des enseignants pendant une séance en classe et dégager ce qui est proposé aux élèves y compris du point de vue de l’enseignant, nous analysons d’abord en utilisant des outils de la didactique des mathématiques les « itinéraires cognitifs » prévus, c’est-à-dire à la fois les tâches définies par les énoncés des exercices donnés aux élèves et le travail envisagé. Ensuite nous mettons en relation les tâches proposées qui viennent d’être dégagées et les déroulements organisés par l’enseignant en classe: nous en déduisons à la fois les activités possibles des élèves et les caractéristiques recherchées des pratiques des enseignants. Il s’agit d’une lecture « double face » des activités possibles des élèves, ce sont les mêmes données recueillies en classe qui sont interprétées des deux points de vue. Cela dit, nous admettons qu’il peut exister des alternatives sur les choix de contenus et de déroulements pour une séance de mathématique donnée. De ce fait la question des choix se pose bien pour chaque enseignant, dans la mesure où ces choix conditionnent les activités des élèves. Cependant les choix globaux pouvant intervenir dans les pratiques, par exemple sur les progressions annuelles et les durées relatives de travail sur chaque chapitre, ne sont pas envisagés ici. Nous restons au niveau des séances (« lessons »). Dans cet article, après avoir présenté notre méthodologie, nous explorons la stabilité des pratiques de deux enseignants expérimentés, à partir d’analyses de séances en classe.2 La mise en évidence de phénomènes que l’on peut interpréter dans les cadres théoriques choisis nous semble justifier une telle étude « clinique » limitée à peu de cas. Ici, nous avons fait varier les conditions de recherche de cette stabilité, dans certaines limites. Les deux enseignants sont expérimentés, en « période de croisière » – il n’y a pas de changement important dans leur enseignement ni dans leurs conditions de travail. Pour le premier enseignant, nous étudions trois classes de sixième (onze ans), de compositions différentes,3 sur la même séance d’exercices. Pour le deuxième, nous considérons deux niveaux scolaires, dans un même établissement sociologiquement favorisé: une classe de quatrième (14 ans) et une classe de troisième (15 ans),4 dans lesquelles nous avons analysé 1
Nous n’analysons pas ici de manière spécifique tout ce qui est relatif à l’usage des signes mathématiques, seul le langage, omniprésent dans la classe, est pris en compte.
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Ces analyses sont plus développées dans un chapitre de l’ouvrage de Vandebrouck (à paraître) qui explicite le cadre théorique adopté ici et présente des études détaillées d’activités d’élèves, en classe, et de pratiques d’enseignants. 3 Nous avons utilisé des données officielles pour étiqueter les classes en « bonne », « moyenne » et « faible » selon les taux de réussite à une évaluation nationale et les dossiers des élèves. 4
Ce sont de bonnes classes avec les mêmes critères que précédemment.
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des séances d’exercices de géométrie analogues. Il n’est pas question ici de comparer les pratiques de ces deux enseignants. Nous cherchons seulement à les étudier, chacun, sur plusieurs séances, de même niveau scolaire ou non. Nous allons montrer que la stabilité se perçoit à deux niveaux: dans les choix de déroulements organisés par l’enseignant (à l’échelle de quelques minutes) et à un niveau beaucoup plus fin dans le détail de son discours. En revanche, ce qui est variable tient à des ajustements ponctuels souvent motivés par les réactions des élèves. Une hypothèse qui émerge de ces résultats est que l’enseignant n’adapte, pendant la séance, que le détail du déroulement qu’il avait prévu. Tout se passe comme s’il était guidé par la volonté de mener son projet initial « au plus près », ne s’adaptant que localement aux élèves. Nous discuterons pour terminer des conséquences éventuelles de ces analyses et des nouvelles questions qu’elles posent. 1.3 Des travaux sur la stabilité des pratiques en classe De manière dominante, les recherches sur les pratiques enseignantes, leurs déterminants et leurs changements postulent l’existence de caractéristiques stables en classe, à une échelle de temps « moyenne » par rapport à la vie professionnelle. L’atteinte de la professionnalité nécessiterait plusieurs années de pratique (de 3 à 5 ans selon les références), et l’enseignant évoluerait ensuite selon un cycle (de stades) de plusieurs années (Huberman 1989). Une hypothèse implicite de stabilité accompagne souvent les travaux sur les communautés des pratiques dans des groupes d’enseignants. Ainsi Borko and Livingston (1989) interprètent des différences entre novices et experts, en mathématiques, en termes de propriétés (supposées stables) de leurs « schémas cognitifs » et de leurs « capacités de raisonnement pédagogique ». Dans un bilan des études sur l’expertise, Berliner (2001) relève des traits caractéristiques chez les enseignants experts: l’automatisation des opérations répétitives nécessaires pour atteindre les buts fixés (« routines ») et la capacité à prendre des décisions « en ligne » (« in-flight » dans le texte). Toujours avec cette même hypothèse implicite de stabilité intraindividuelle des pratiques, d’autres recherches, souvent d’orientation psychosociologique, s’interrogent sur les différences entre enseignants. Opdenakker and Van Damme (2006) identifient ainsi trois « dimensions » significatives des « styles d’enseignement » (centration sur le contenu, centration sur l’élève et capacités de gestion de l’activité en classe). Les auteurs discutent les données de la littérature sur le fait que ces styles soient ou non des indicateurs de « bonne pratique » d’enseignement mathématique. Le terme « style d’enseignement » peut d’ailleurs référer à d’autres dimensions: ainsi Weber (2004) montre qu’un enseignant use de styles différents de traitement de la démonstration selon les contenus; ces styles, « formel », « procédural » ou « sémantique », influencent effectivement la manière dont les élèves cherchent à apprendre le contenu. Il faut souligner que le niveau auquel sont postulées, dans ces travaux, les invariances des pratiques est le plus souvent (très) global, et que la place du contenu y est seconde. De plus les différentes approches basées sur des modèles de détermination des pratiques, insistent sur la « nécessité » présente dans l’activité de l’enseignant, mais ne donnent pas directement de place à la « contingence », c’est-à-dire à la manière dont l’enseignant gère la dynamique de son interaction didactique avec les élèves dans des circonstances données. Un exemple d’impact du contenu sur le niveau fin des interactions est toutefois présenté dans Lee (2007). Bien qu’il s’agisse d’un enseignement de l’anglais seconde langue, cette approche pragmatique converge avec la nôtre.
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En ce qui concerne les mathématiques, dans les enquêtes internationales comme PISA et surtout TIMSS (Hiebert et al. 2000), une certaine stabilité des pratiques des enseignants de mathématiques est aussi implicite dans la mesure où des comparaisons générales sont faites à partir d’un nombre limité de séances, même si dans l’enquête LPS (Clarke 2006), le nombre de séances analysées est plus conséquent. Le modèle présenté par Schoenfeld (1998), caractérise les décisions et des actions de l’enseignant comme fonction de ses connaissances, de ses buts et de ses croyances (« beliefs »); ces déterminants sont évidemment marqués par le contenu considéré. Ce modèle est utilisé pour caractériser un moment dans l’activité d’enseignement, y compris au niveau de l’interaction avec les élèves et vise aussi à prédire le comportement d’un enseignant dont on a préalablement identifié l’ensemble des déterminants, ce qui sous-entend l’existence de certaines invariances. Enfin, des analyses du langage et de la communication dans la classe ont amené à repérer des routines dans les interactions et à poser la question de la difficulté de changer les façons de faire des enseignants de mathématiques en classe (cf. Steinbring et al. 1998). Dans la littérature francophone, la stabilité des pratiques des enseignants a déjà été soulignée par Crahay (1989) qui indiquait de plus que c’est au moment des préparations que les enseignants peuvent modifier éventuellement leur projet et non pendant les déroulements. D’autres précisions sur cette stabilité ont été obtenues dans les recherches de Maurice and Allègre (2002) mettant en évidence une certaine invariance temporelle des déroulements adoptés en classe, par chaque enseignant étudié, variable selon les enseignants. En mathématiques, plusieurs recherches, portant sur un nombre limité d’enseignants, ont contribué à l’exploration de la stabilité des pratiques: Josse (1993), Chiocca et al. (1991), Robert 1995 pour la répartition des différents discours tenus en classe (strictement mathématique, enrôlement), Hache (2001) pour la stabilité de certains discours de l’enseignant, indépendamment du contenu mathématique en jeu. De son côté Vandebrouck (2002) a révélé des invariances dans l’utilisation du tableau (noir) par un même enseignant, dans trois classes de lycée de niveaux différents. Enfin Roditi (2003) a mis en évidence chez quatre enseignants des choix invariants de déroulements lors de l’enseignement de la multiplication des décimaux, en sixième (onze ans).
2 Méthodologie Pour analyser les pratiques, nous étudions les activités des élèves provoquées pendant des séances d’exercices sur des tâches mathématiques proposées par l’enseignant en classe, qui définissent l’itinéraire cognitif choisi. Nous parlons d’activité mathématique lorsque nous entrons dans la description de ce qui se passe en classe par ce que font ou peuvent faire les élèves. La tâche correspond à l’entrée par la description de l’énoncé. Cette différence de point de vue nous sert à suivre l’évolution des choses. Nous allons développer successivement la méthodologie adoptée pour les analyses de tâches, de déroulements et d’activités puis les analyses de discours. 2.1 Analyse des tâches à partir des énoncés proposés en classe Pour nous une tâche mathématique est caractérisée par les mises en fonctionnement attendues, prévisibles, des connaissances des élèves, déterminées à partir de ce qui est à leur disposition dans leurs cours. Nous détectons pour chaque exercice les connaissances à utiliser, anciennes ou nouvelles, indiquées ou non, et les adaptations que les élèves auront à
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en faire: il est indispensable, pour ce faire, d’étudier l’énoncé précis proposé aux élèves, le type de l’exercice ne suffit pas. Ces analyses sont évidemment relatives à une classe donnée, d’un niveau scolaire donné. Il existe d’autres analyses de tâches faisant intervenir moins directement les connaissances précises à mettre en fonctionnement dans un exercice donné, référant exclusivement à la nature du travail attendu: conjecture, recherche de démonstrations, application d’une procédure ... (Stein 1996). Précisément, nous qualifions de tâches simples et isolées (TSI) les applications immédiates, sans adaptation, d’une propriété à mettre en œuvre pour résoudre un exercice: en général l’activité correspondante des élèves consiste à remplacer des données générales par les données du contexte de l’exercice traité. Les applications de procédures sont souvent simples et isolées. Nous avons défini également sept types d’adaptations qui peuvent intervenir simultanément dans les exercices analysés à partir de leurs énoncés; ces adaptations qualifient toujours des connaissances précises, variées (Robert 1998, 2005): A1. Les reconnaissances (partielles) des modalités d’application des notions, théorèmes, méthodes, formules...: par exemple, reconnaître la configuration où utiliser le théorème de Pythagore. Les conjectures relèvent de ce type d’adaptation et peuvent mettre en jeu des connaissances non indiquées (appelées disponibles). A2. L’introduction d’intermédiaires – notations, points, expressions...: par exemple introduire une parallèle, ou nommer un point pour utiliser un théorème. A3. Les mélanges de plusieurs notions, les changements de points de vue, les changements ou jeux de cadres (Douady 1986), les mises en relation: par exemple, en géométrie, utiliser du calcul algébrique pour obtenir le résultat ou remplacer un alignement de points par le fait qu’un angle est plat. A4. L’introduction d’étapes, l’organisation des raisonnements ou des calculs: en géométrie, utiliser quatre fois le théorème de Pythagore de manière non indépendante puis sa réciproque. Les étapes peuvent être classiques (étude d’une fonction) ou à imaginer. Les recherches de démonstrations complexes relèvent souvent de ce type d’adaptation. A5. L’utilisation de questions précédentes dans un problème. A6. L’existence de choix – forcés ou non. A7. La confrontation à un manque de connaissances. 2.2 Analyse des déroulements: chronologie, formes de travail, aides et discours de l’enseignant pendant les interactions avec les élèves Les analyses sont faites à partir de séances en classe (filmées et transcrites). Nous étudions systématiquement la forme (collective, individuelle, petits groupes...) et la nature du travail (recherche, correction, ...) organisées dans la classe et la chronologie du déroulement. C’est la nature du travail proposé successivement aux élèves par l’enseignant sur chaque sous-tâche qu’il indique qui nous permet de délimiter les phases de nos analyses, à 30 secondes près. Nous repérons ces sous-tâches à partir des tâches mises en évidence dans nos analyses a priori de chaque question des énoncés des exercices. Pour préciser ce qui peut interagir sur les activités des élèves, les aides que l’enseignant apporte au fur et à mesure sont prises en compte ainsi que deux caractéristiques qui contribuent à préciser, en reconstituant les visées de l’enseignant, ce que peuvent produire leurs discours dans les phases d’interaction: les fonctions du discours et les buts illocutoires.
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2.3 Aides Nous avons distingué deux types d’aides. Les unes, dites « procédurales », modifient les tâches prévues. Elles proviennent des indications que donne l’enseignant avant ou pendant le travail des élèves. Elles peuvent conduire à découper la tâche en introduisant des sous tâches explicites, ou à choisir une méthode adaptée comme dans l’exemple qui suit: « Isabelle comment on voit qu’un nombre est multiple de 3? Quelle est la règle du cours Isabelle? Si la somme de ses chiffres... La somme de ses chiffres pour 135, c’est quoi Isabelle les chiffres de 135 » (PC, 6°1) Les autres aides, dites « constructives », ajoutent quelque chose entre l’activité stricte de l’élève et la construction (espérée) de la connaissance qui pourrait en résulter, que ce soit par une reprise de ce qui a été fait ou par des rappels, des bilans, des interventions amenant les élèves à revenir sur leur activité. En voici un exemple: « Alors ce qui est intéressant dans cet exercice, c’est qu’on a une seule question et que finalement on a appliqué la réciproque du théorème de Pythagore, le résultat où la formule n’est pas vérifiée mais on peut conclure que le triangle n’est pas rectangle et à l’aide après d’une somme de deux angles on a pu conclure. » (DD, 4°)
2.4 Fonctions du discours En nous inspirant des fonctions du discours repérées par Bruner (1983) dans le processus de tutelle ou d’étayage de l’adulte qui vient en aide à l’enfant, nous avons attribué certaines fonctions aux interventions du professeur (cela concerne notamment les deux types d’aides). Ces fonctions précisent la manière dont l’enseignant intervient pas à pas dans le détail du travail des élèves en essayant de soutenir leurs activités: est-ce qu’il est en train de parler de ce qu’ils ont à faire, les corrige-t-il, les encourage-t-il ...? Nos fonctions sont spécifiées au détail de la conduite d’une classe de mathématiques, nous permettant ainsi de caractériser la multiplicité des formes que l’étayage peut prendre dans la classe (Chappet Pariès 2004). Par exemple, nous distinguons quatre fonctions d’enrôlement (cf ci-dessous). Nous avons distingué les dix fonctions suivantes, réparties en deux groupes: Les fonctions cognitives: elles ont un rapport avec la tâche à résoudre et le savoir mathématique. Ce sont, dans l’ordre où on peut souvent les rencontrer, les fonctions: – – – – –
distribution des tâches: elle indique à l’élève ce qu’il doit faire. « Je voudrais que vous me trouviez un nombre qui soit divisible ni par 2, ni par 3, ni par 5, ni par 9 mais qui soit divisible par autre chose que lui même et 1 » (PC, 6°3) introduction d’une sous-tâche: elle fractionne la résolution d’une tâche. « 42, est-ce que vous êtes d’accord avec Idriss? Parce qu’il est divisible par? » (PC, 6°3) bilan: elle correspond à la donnée de la réponse attendue par le professeur (tout ou partie) ou à celle d’un commentaire. « Donc vous avez ABC et vous avez ACD, voilà » (DD,4°) justification: elle est associée à la donnée ou la demande d’une preuve. « Forcément ce sera un nombre impair puisque tous les nombres pais vont être divisibles par 2 » (PC, 6°3) structuration: elle explicite la séquentialité de l’action. Elle permet à l’élève de se repérer dans le déroulement de la séance, du raisonnement.... « Première étape qu’estce que je vais faire? » (DD,4°)
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évaluation: elle exprime une appréciation des réponses des élèves ou de leur travail. « Oui ça c’est d’accord. » (DD,4°)
Les fonctions d’enrôlement: elles sont apparemment indépendantes de la tâche même si elles peuvent avoir un effet sur la résolution. Elles permettent au professeur de maintenir la communication. Ce sont les fonctions : – – – –
engagement: avec elle le professeur interpelle explicitement les élèves. mobilisation de l’attention: le professeur y a recours pour maintenir l’engagement. encouragement. mutualisation de la réponse d’élèves: elle permet au professeur de la faire partager à tous, telle quelle.
Le contenu du discours et son rôle par rapport au travail des élèves permettent d’étiqueter les fonctions du discours. Nous avons par exemple considéré qu’une reprise stricte de la parole de l’élève était une mutualisation; dès qu’elle s’accompagne d’un ajout nous l’avons couplée à une évaluation voire un bilan selon l’ajout: Elève: variable Professeur: variable, x est une variable, le point M varie. (DD,3°) Ici la mutualisation est suivie d’une évaluation et d’un bilan. 2.5 Buts illocutoires Le but illocutoire indique une certaine valence du discours, destiné à l’interlocuteur: valeur de vérité, information sur l’état du monde, incitation à l’action, déclaration d’intention, jugement.... Il existe dans la théorie des actes de langage (Gilly et al. 1999) cinq buts illocutoires: assertif, commissif, déclaratif, expressif, directif. Nous en avons introduit un sixième, le but commissif/directif qui nous a permis de rendre compte du «on» ou du «nous» qu’utilise le professeur lorsqu’il s’associe aux élèves dans un projet d’action. Nous avons voulu, en introduisant les buts illocutoires dans nos analyses, insister sur la dimension «actionnelle du discours », telle que la présente Vernant (1997): « Par un acte de discours, est effectivement et directement produite une action sur le monde. Par une sorte de «magie verbale », le dire devient le faire. » Ainsi les buts indiquent-ils ce que cherche à produire le contenu du discours comme « action immédiate » des élèves ou, au contraire, comme message à recevoir. Les buts illocutoires sont identifiés à partir du contenu et de la forme du discours. Pour les repérer, nous regardons le mode des verbes utilisés, la forme des propositions (interrogative, affirmative...) et l’implication du locuteur et/ou du récepteur. Le chercheur qui a codé l’ensemble du corpus analysé ici a une longue expérience de ce codage dont la stabilité a été avérée ce qui légitime la comparaison entre corpus (Chappet Pariès 2004, 2006). Quels renseignements ces indicateurs nous apportent-ils sur les activités des élèves? Les fonctions nous renseignent évidemment sur les activités de l’enseignant mais au-delà elles nous précisent la manière dont l’enseignant pense accompagner et aider les élèves même si ceux-ci n’en profitent pas toujours. Notamment les aides déterminées globalement à partir du contenu du discours peuvent être précisées grâce aux fonctions utilisées pour les donner: une aide procédurale peut être associée à un découpage en sous tâches, une structuration voire une évaluation. Les activités des élèves peuvent être modifiées différemment selon les fonctions.
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Les buts illocutoires traduisent plutôt la façon dont l’enseignant précise la répartition des différents rôles dans la résolution d’une tâche: ce qu’il garde à sa charge, ce qu’il dévolue aux élèves, ce sur quoi il envisage une collaboration avec les élèves. La part d’autonomie laissée aux élèves devient alors un peu plus lisible. 2.6 Activités possibles des élèves et pratiques des enseignants en classe Les activités possibles des élèves sont déduites des mises en relation des analyses des tâches et de déroulements. Elles sont reconstituées à partir des analyses de déroulements, elles mêmes organisées à partir des analyses a priori. Ces dernières nous donnent un premier découpage selon les tâches proposées dans les énoncés; c’est ensuite la nature du travail organisé par l’enseignant, sur ces tâches et sur les sous-tâches qu’il indique, qui nous sert à repérer le découpage final en phases (ici de l’ordre de quelques minutes). Le mot phase est utilisé dans un sens banal, on peut parler aussi d’épisode. La lecture « double face » de ces activités déjà évoquée plus haut permet enfin de relire les données du point de vue des choix de l’enseignant pour la séance. La dimension cognitive est dégagée essentiellement à partir des choix d’énoncés proposés aux élèves, ici les choix de gestion a priori ne sont pas connus pour un des enseignants. La dimension médiative est recomposée à partir de toutes les caractéristiques des déroulements analysés: aussi bien la gestion effective que les caractères pragmatiques analysés. Les stabilités recherchées peuvent apparaître dans chaque dimension et aussi dans leur imbrication. Notons que c’est cette dernière qui est la plus proche de la complexité des pratiques réelles, alors que toute décomposition est nécessairement « provisoire », c’est une création artificielle du chercheur (Robert 2005). Une confirmation de certaines analyses peut être obtenue à partir d’entretiens avec les enseignants, ce que nous n’avons que pour l’enseignant de 4°, 3°.
3 Deux études de cas 3.1 Le cas d’un enseignant sur le même contenu dans trois classes différentes Cet enseignant – PC dans ce texte – a une dizaine d’années d’expérience et enseigne dans trois classes de 6° d’un collège avec le même curriculum et le même nombre d’élèves (une trentaine). La classe de 6°1 est « moyenne », celle de 6°2 est « bonne » et celle de 6°3 « faible ». Les observations ont été effectuées le même jour. 3.1.1 L’analyse des tâches La séance s’inscrit dans un travail sur la division. Elle porte sur le même contenu dans les trois classes: la correction d’un exercice cherché à la maison, la recherche de deux exercices nouveaux. Enoncé de l’exercice à faire à la maison: tâche n°1 Voici une liste de dix nombres: 207 ; 815 ; 79 ; 116 ; 48 ; 135 ; 950 ; 29 ; 5 208 ; 360. Faire un tableau comme ci-dessous et le remplir.
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M. Pariès et al.
Divisibles Par 2 Par 3 Par 5 Par 9
Nombres de la liste 207 207
Il s’agit d’utiliser et d’énoncer correctement les critères de divisibilité par 2, 3, 5 et 9, vus la veille. La tâche consiste à combiner, pour chaque nombre, de manière indépendante tous les critères de divisibilité (adaptation A1). Soulignons que deux types de critères interviennent: somme de chiffres et nature du chiffre des unités. Le contrat semble clair grâce à l’exemple. Enoncé donné à l’oral : tâche n°2 Trouver des nombres non divisibles par 2, 3, 5, 9 mais divisibles par un nombre autre que lui même et 1.
La tâche est complexe puisqu’elle demande l’utilisation conjointe et négative de tous les critères de divisibilité; de plus il n’y a pas unicité de la solution. Il n’y a ni algorithme ni test a priori qui s’applique. Il s’agit d’introduire un nombre quelconque (adaptation A2) puis d’appliquer tous les critères révisés (A1 et A6). Enoncé donné à l’oral ; les divisions sont écrites au tableau : tâche n°3 Effectuer les divisions suivantes et les poursuivre après la virgule jusqu’à ce que la division s’arrête ou jusqu’à ce que vous deviniez la suite. 118 : 66 ; 13 : 52 ; 376 : 5 ; 341 : 3 ; 45 : 8
La tâche porte sur des divisions déjà abordées à l’école primaire (A3) mais comme la consigne de l’enseignant est « de les continuer après la virgule jusqu’à ce qu’on puisse dire quelque chose » ou « dire quelque chose d’intéressant» ou « dire quelque chose de malin », l’élève peut aussi être confronté à du nouveau (A7). Globalement les tâches proposées par l’enseignant présentent une certaine diversité, commune aux trois classes. 3.1.2 Les déroulements Les formes de travail sont les mêmes dans les trois classes: les élèves travaillent à leur place et sont interrogés individuellement, nominativement ou non, ou collectivement. Lors de la correction des exercices cherchés à la maison (tâche n°1), un élève ou deux sont sollicités au tableau et le professeur circule dans la classe pour vérifier le travail; la tâche n°2 est engagée à la suite de cette correction et les élèves n’ont aucun temps de recherche individuelle; pour la tâche n°3, en revanche, un long temps de recherche individuelle est ménagé. Nous ne distinguons pas ici les activités proposées par l’enseignant des activités possibles des élèves: ce sont les mêmes. Le matériel recueilli ne permet pas de repérer des activités a maxima et a minima. La chronologie est présentée dans le Tableau 1 qui récapitule les temps observés pour les différentes phases de chacune des séances.
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Tableau 1 Chronologie du déroulement de la séance dans les trois classes Temps consacré aux différentes phases Nature du travail organisé Correction de l’exercice cherché à la maison (Tâche no. 1) Remarques et élargissement (tâche no. 2) Divisions: (Tâche no. 3)
6°1
6°2
6°3
Collectif 8′30
Collectif 10′
Collectif 17′
Collectif 4′30
Collectif 9′
Collectif 11′
Présentation du travail Présentation du travail Présentation du travail collective puis recherche collective puis recherche collective puis recherche individuelle 15′ individuelle 14′ individuelle 16′ Collectif 11′ Collectif 10′30 Collectif 7′
Correction de quelques divisions Recopie sur le cahier de 6′ cours Donnée du travail pour la Collectif 7′ fois suivante
×
×
Collectif 6′
Collectif 2′
Nous constatons que les mêmes phases de travail se retrouvent dans le même ordre, dans les trois classes. Le temps passé à la première correction est différent: en 6°3, le temps de correction est presque double car l’enseignant non seulement fait des remarques sur le travail à la maison (comme en 6° 2) mais fait justifier tous les résultats au fur et à mesure de la correction (comme en 6°1). Le temps consacré aux remarques et élargissements est aussi variable. Dans tous les cas il s’agit de commenter le tableau rempli obtenu: les nombres qui n’apparaissent pas, les nombres qui apparaissent à toutes les lignes et les nombres qui n’apparaissent que quelquefois. Selon les classes, c’est le professeur ou les élèves qui donnent les réponses. L’enseignant consacre à l’élargissement (tâche n°2) des temps différents: en 6°2, la tâche est enrichie par la recherche de nombres premiers, ce qui n’est pas le cas ailleurs; en 6°3 les élèves ont beaucoup de difficulté à répondre, de nombreuses propositions ne conviennent pas: le professeur s’y attarde et justifie son évaluation. Pour la tâche n°3, le travail demandé est sensiblement le même: bien que présentées à l’oral, certaines consignes importantes se retrouvent dans les trois classes au mot près. Le temps de recherche est assez comparable: dans les trois classes, les élèves s’engagent individuellement dans les calculs, comme le montrent les interventions du professeur qui corrige individuellement les élèves et s’applique à détailler, pour certains, les calculs. La correction des divisions est analogue dans les trois classes: le professeur écrit au tableau et les élèves sont interpellés à tout instant pour compléter les calculs. Il reste toutefois moins de temps en 6°3. Nous présentons en annexe, dans le Tableau 7, les (sous-)tâches et les activités proposées aux élèves dans les trois classes. Sont soulignées les activités qui apparaissent au moins dans deux classes et mises en italique celles spécifiques à une classe. Globalement nous retrouvons, dans les trois classes, un travail similaire et le même enchaînement d’activités (ordre et nature) sur les trois tâches. Cependant, pour la tâche n°1, en 6°3 le professeur doit accompagner pas à pas le remplissage du tableau, contrairement à ce qui se passe dans les deux autres classes: les activités des élèves y sont réduites à des tâches simples et isolées.
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M. Pariès et al.
Pour la tâche n°2, les activités des élèves sont différentes. En 6°1, le professeur ne laisse aucune place à la production de nombreux nombres, seuls deux nombres sont proposés. En 6°2 et 6°3, les élèves ont le temps de faire de nombreuses propositions. Si les nombres ne conviennent pas le professeur demande aux élèves une justification et relance la question, qu’il répète même huit fois dans la classe la plus faible. Enfin en 6°2, une nouvelle tâche est même proposée aux élèves: rechercher des nombres premiers à deux chiffres. Pour la tâche n°3, les activités proposées aux élèves diffèrent légèrement selon les classes. Dans les trois classes, appliquer l’algorithme de la division semble difficile aux élèves. Le professeur les aide à se repérer quant au choix du nombre de chiffres à prendre en compte pour déterminer le premier chiffre du quotient. Cependant, là encore, que ce soit dû au manque de temps ou aux difficultés éprouvées par les élèves, si l’exercice a pu être terminé en 6°1 et 6°2, seule une division est corrigée en 6°3. La classification des divisions en deux catégories, celles qui se terminent et celles qui ne se terminent pas, n’est pas envisagée en 6°3. Enfin, il n’y a qu’en 6°2 que le professeur aborde la distinction entre quotient entier et quotient exact. Les aides5 sont pour la plupart procédurales, dans les trois classes, avec un découpage de la tâche à résoudre en sous tâches. On peut noter en particulier qu’il y a plus de sous tâches explicitement indiquées en 6°3 (Tableau 7), ce qui correspond à des aides procédurales. Quelques aides peuvent se rapprocher d’aides constructives mais elles sont rares et assez générales (elles concernent le comportement à l’école). 3.1.3 L’analyse du discours du professeur pendant la tâche n°2 Nous présentons dans le Tableau 2 les fonctions du discours du professeur dans les trois classes et dans le Tableau 3, les buts illocutoires accompagnant le travail des élèves sur la tâche n°2 qui consiste à trouver des nombres non divisibles par 2, 3, 5, 9 et non premiers (ce mot n’est pas donné aux élèves). Dans la classe de 6°1, l’échange est limité et les pourcentages sont moins significatifs. Ils indiquent néanmoins des tendances. En fait, la plus grande importance relative des fonctions d’enrôlement dans la classe faible correspond à une différence dans la mise au travail des élèves qui s’accompagne de plus de répétitions de la consigne à l’identique. En revanche, la fonction mutualisation est plus importante en 6°2 (classe forte) alors que les autres fonctions d’enrôlement direct sont plus importantes en 6°3 (classe faible). Tout se passe comme si, dans la classe la plus forte, l’enseignant avait moins à entraîner les élèves dans la résolution de la tâche qu’à faire partager à tous les élèves les réponses de chacun. Le début du travail et le maintien dans l’activité sont donc accompagnés différemment dans les trois classes sans changement de tâche. On note enfin dans les trois classes une place quasi identique pour les fonctions bilan et évaluation ainsi que pour la fonction justification. Autrement dit, le discours tenu à la fin du travail des élèves sur une sous tâche ne semble pas dépendre des aléas qui ont pu accompagner la résolution: l’enseignant donne à tous les élèves les mêmes conclusions. Les buts illocutoires sont exprimés, dans les trois classes de façon très similaire. Ils sont massivement directifs et assertifs. Quelles que soient les réactions des élèves, l’enseignant ne change ni la part d’information qu’il donne aux élèves ni la part d’autonomie globale
5
Des exemples pre´cis tire´s des transcriptions sont donne´s dans Vandebrouck, a` paraître.
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Tableau 2 Les fonctions du discours de l’enseignant dans les trois classes Fonctions
6°1
6°2
6°3
Distribution des tâches Découpage en sous tâche Bilan Structuration Justification Evaluation Fonctions cognitives Engagement-Encouragement-Mobilisation attention (enrôlement direct) Mutualisation Fonctions d’enrôlement Total des occurrences
9% 14% 14% 6% 3% 14% 60% 29% 11% 40% 35
3% 10% 12% 4% 5% 19% 51% 25% 24% 49% 110
7% 6% 14% 1% 6% 16% 46% 40% 14% 54% 143
qu’il entend leur laisser en utilisant le but directif: les difficultés rencontrées par les élèves ne modifient pas ces visées qui ne sont pas nécessairement explicites. Le but expressif est réservé à des interventions sur le comportement des élèves avec une coloration affective. Il est exprimé de façon similaire en 6°2 et 6°3, classe « forte » et classe « faible ». 3.1.4 Bilan La stabilité des pratiques de cet enseignant dans les trois séances analysées se marque d’abord dans la dimension cognitive: les tâches proposées sont identiques dans les trois classes mais ce n’est pas inattendu. La stabilité se marque aussi dans la dimension médiative: la succession des phases de travail proposées aux élèves est analogue, ce qui est déjà moins prévisible. Les différences se marquent dans des durées qui correspondent à des ajouts ne modifiant pas la tâche globale: justifications systématiques ou sous tâches intermédiaires. De fait ce sont les aides procédurales qui diffèrent et non les aides constructives (à l’exception de celles qui concernent le comportement à l’école, plus importantes dans la classe la plus faible). Du point de vue pragmatique, restreint à l’étude d’une phase d’interaction commune aux trois classes, on trouve une réelle invariance dans les buts illocutoires utilisés et peu de variation dans l’utilisation des fonctions malgré des réactions d’élèves très différentes selon les classes. La variation de l’utilisation de la fonction mutualisation est cependant associée à ces réactions: tout se passe comme si cet enseignant essayait, dans la classe faible, de ne pas perdre d’élèves en chemin en les enrôlant davantage et en découpant éventuellement ou reformulant les tâches à résoudre, au sein de son projet initial inchangé. La recomposition des deux dimensions précédentes amène à dégager une certaine logique des interventions de cet enseignant, analogue dans les trois classes. D’une part, les adaptations locales des tâches dans le sens d’une simplification dès que les élèves échouent et les enrôlements d’autant plus importants que la classe est faible sont le signe d’une Tableau 3 Les buts illocutoires exprimés dans les trois classes
Assertif Directif Expressif
6°1
6°2
6°3
42% 54% 4%
51% 48% 1%
51% 48% 1%
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M. Pariès et al.
pratique cherchant à développer l’action des élèves à tout prix. D’autre part, l’invariance des tâches globales proposées, l’accompagnement identique de la fin du travail sur la tâche n°2 et la proportion quasi analogue des buts assertifs indiqueraient une pratique ne renonçant pas à donner les mêmes informations à tous les élèves, après leur action. 3.2 Le cas d’un enseignant sur des contenus analogues dans une quatrième (14 ans) et une troisième (15 ans) Cet enseignant – DD – a plus de vingt ans d’expérience. Nous avons filmé une séance de résolution d’exercices de géométrie en classe de quatrième et en classe de troisième, de bon niveau, dans un établissement favorisé. Les séances portent respectivement sur l’utilisation du théorème de Pythagore en 4° et du théorème de Thalès en 3°; elles suivent toutes deux la présentation du cours et, dans les deux cas, l’exercice est le second de la séance. 3.2.1 L’analyse des tâches Enoncé en quatrième
Il s’agit d’effectuer un raisonnement à plusieurs étapes (adaptation A4) et avec de nombreux changements de points de vue successifs (A3): interpréter un alignement par un angle plat, introduire deux angles à la place d’un (dont il est la somme), remplacer la recherche de la mesure de ces deux angles par la recherche de la nature de deux triangles, rectangle ou non. On peut noter que si aucun des triangles n’était rectangle les élèves ne pourraient pas conclure à ce niveau scolaire; la comparaison de la longueur de [BD] et de la somme des longueurs de [BC] et [CD] n’est non pas plus évoquée. Deux tâches isolées sont incluses dans ces étapes: les recherches de la nature des deux triangles ABC et ACD; comme les côtés opposés aux angles candidats à être droits sont facilement identifiables, étant les plus longs, les modalités d’application du théorème de Pythagore ou de sa réciproque comportent une seule adaptation – le choix du théorème « légitime » (A1). Les calculs demandés portent sur des entiers ou des décimaux à un chiffre après la virgule et la calculatrice est fiable. Enoncé en troisième EFG est un triangle tel que EF = 5, EG = 7, FG = 9 (l’unité est le cm). On prend un point M sur le segment [EF] et on pose EM = x. Un point N est sur le segment [EG] et tel que les droites (MN) et (FG) sont parallèles. 1) Exprimer EN et MN en fonction de x. 2) Calculer x pour que le périmètre du trapèze MNGF soit égal à 19,8.
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Il s’agit de:
& & & & &
Faire une figure avec un point variable – cette première étape n’est pas indiquée explicitement; les données numériques n’excluent pas une construction en partie en vraie grandeur et un travail de mesurage. Placer M relève d’une adaptation (A1). Reconnaître qu’il faut utiliser le théorème de Thalès dans la figure donnée, et l’utiliser en adaptant l’énoncé du théorème donné en quatrième en remplaçant la longueur EM par x (utilisation non simple du théorème- A1). Faire une transformation algébrique sur des fractions qui font intervenir des nombres et des lettres, deux fois de suite, de manière indépendante (travail dans un deuxième cadre- A3). Exprimer le périmètre d’un trapèze, à retrouver, par une expression algébrique à compléter en relation avec les résultats précédents (A2). Mettre en forme et résoudre (travail algébrique) une équation du type c=ax+b (A3, A1), et vérifier que la solution est géométriquement acceptable (non indiqué).
Les deux énoncés sont différents du point de vue des adaptations des théorèmes visés: on reste dans des adaptations liées à la contextualisation du théorème de Thalès dans l’exercice de troisième, de type reconnaissance de modalités d’application et mélanges géométrie/ algèbre (changements de cadres indiqués) – codées A1 et A3 - la partie algébrique étant travaillée presque indépendamment et pour elle-même. Le seul calcul d’intermédiaire (A2) est très guidé. Le théorème, non cité dans l’énoncé, sert d’outil à un calcul qui est directement lié à une figure emblématique du théorème, déjà vue en quatrième. En revanche ce n’est qu’après une adaptation liée à un raisonnement complet, avec étapes et nombreux changements de points de vue (adaptations codées A4, A3) que les élèves peuvent contextualiser de manière isolée le théorème de Pythagore et sa réciproque dans une figure comportant au moins deux triangles. Ensuite, la seule adaptation (codée A1) est la reconnaissance, deux fois de suite, du « bon » théorème parmi trois énoncés, répétés juste avant l’exercice6 et mis en fonctionnement isolément dans l’exercice précédent. De plus les théorèmes apparaissent comme des outils non cités dans l’énoncé et on verra que leur utilisation, malgré les effets de contrat possibles, n’est pas immédiate pour les élèves. L’exercice de quatrième met en jeu ainsi des niveaux de mises en fonctionnement qui nécessitent a priori davantage d’initiative de la part des élèves que celui de troisième: on peut prévoir que peu d’élèves pourront le faire seuls. Comment le déroulement organisé par l’enseignant prend en compte ces différences? Et comment cela se traduit-il dans la structure et les patterns d’interaction avec les élèves? 3.2.2 Les déroulements Les formes de travail sont analogues: les élèves travaillent à leur place et sont interrogés individuellement ou collectivement. Ces deux exercices durent une demi-heure environ et terminent la séance. Le Tableau 4 présente la chronologie des phases de travail installées par l’enseignant dans l’exercice « Pythagore » et dans l’exercice « Thalès ». 6
Juste avant de donner cet énoncé l’enseignant a fait répéter à un élève les trois énoncés dont la classe dispose: le théorème de Pythagore, sa réciproque et la contraposée (qui n’a cependant pas de nom dans la classe).
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M. Pariès et al.
Tableau 4 Chronologie du déroulement des séances dans les deux classes Temps consacré aux différentes phases Pythagore (4ème) Nature du travail organisé Travail sur la Figure Recherche de stratégie Recherche de la solution Correction à recopier Total
6′ Individuelle puis collective 8′30 Individuelle 4′30 9′ 28′
Thalès (3ème) Première question (1) début, (2) fin Réalisation 2′30 Collective (1) 5′30
Seconde question
Total
Collective 2′30
2′30 8′
En deux temps 2′ 2′ 3′
Individuelle 2′ 10′
4′ 15′ 30′
On remarque en quatrième et en troisième des analogies importantes, structurelles, dans l’organisation, le découpage du travail, l’ordre, la nature et la durée des différentes soustâches imposées par l’enseignant à l’échelle de 4-5 minutes (sur les deux questions), malgré la différence des tâches. C’est l’enseignant qui impose, dans les deux cas, l’installation collective de la stratégie à suivre, en faisant ou non précéder la mise en commun d’une recherche individuelle: les durées, cumulée en troisième et simple en quatrième, sont les mêmes; il laisse ensuite à nouveau travailler les élèves individuellement sur la résolution dans les deux cas (en deux temps pour la première question en troisième) – là encore les durées (cumulée en troisième et simple en quatrième) sont les mêmes. Il délivre enfin dans les deux cas une correctionmodèle au tableau, écrite par lui-même en partie sous la dictée, ou par un élève, très guidé sauf pour les calculs. La correction dure davantage en troisième alors que le tracé de la figure prend plus de temps en quatrième. Cela dit, le découpage en trois sous-questions, dont la dernière n’est pas géométrique, de l’exercice de troisième, peut expliquer en partie certaines différences: les trois étapes de l’exercice de quatrième sont moins distinctes. Dans les deux classes les aides aux élèves sont essentiellement «procédurales» (cf. Vandebrouck à paraître). Elles permettent la plupart du temps de pointer un élément de la tâche à résoudre; cependant, dans les deux classes, des aides «constructives» sont présentes pendant la correction et le lien ancien/ nouveau est pris en charge par des rappels et/ou des répétitions. Il n’y a aucune aide constructive concernant la stratégie globale: l’entrée dans l’exercice par le tracé de la figure, la recherche de la méthode... Ce qui est commun dans les activités des élèves est plus lié à la nature du travail provoquée par l’enseignant et à l’enchaînement des activités successives qu’à leur contenu strict. De plus, on distingue les activités mathématiques proposées d’emblée par l’enseignant à partir des tâches, et les activités possibles des élèves, et on peut inférer ici des activités a minima et a maxima. Certains élèves peuvent par exemple ne pas avoir à leur charge le questionnement préalable et développer après la recherche collective des méthodes à mettre en œuvre des activités a minima, isolées, voire simples. Le temps de recherche individuelle laissé aux élèves après la mise au point de la stratégie leur permet dans les deux cas de (re)chercher, voire de traiter des sous-tâches, au moins les premières. Enfin la correction soigneuse permet de laisser un modèle de rédaction de solution dans les cahiers des élèves qui recopient le tableau.
Analyses de séances en classe et stabilité des pratiques
73
3.2.3 L’analyse du discours du professeur pendant les phases d’élaboration de la stratégie de résolution et de correction Nous présentons dans le Tableau 5 les fonctions du discours du professeur dans les trois classes et dans le Tableau 6, les buts illocutoires. Pour ce professeur, nous remarquons, pour la phase d’élaboration d’une stratégie, une stabilité globale d’utilisation des fonctions cognitives et des fonctions d’enrôlement. Dans le détail, il y a peu de variation. On peut noter toutefois plus de fonctions bilan, justification, mutualisation en 3° et plus de structuration en 4°, pour cette phase. Nous faisons l’hypothèse que ces variations sont liées aux déroulements compte tenu plus ou moins de la tâche mais en tout cas compte tenu des élèves. La tâche plus difficile et moins découpée au départ en 4° explique la part plus grande de structuration, les réponses moins fréquentes des élèves amènent moins de mutualisation et moins de bilan alors qu’en 3° les élèves ont plus de propositions à faire. En ce qui concerne la phase de correction, nous notons une stabilité dans l’utilisation des fonctions de découpage en sous tâche, structuration, enrôlement direct (hors mutualisation). Cependant, les fonctions de bilan et d’évaluation sont plus fréquentes en 3° alors que la fonction mutualisation est plus utilisée en 4° (23% au lieu de 9%). Rappelons que l’exercice est plus difficile en 4°, les élèves y sont peu accoutumés et la majorité d’entre eux ne l’a pas résolu. La correction est en même temps un temps de résolution/recherche: le professeur y engage encore les élèves, reprend leurs réponses. En 3°, les élèves ont travaillé, beaucoup ont trouvé. La correction est donc plutôt une correction évaluation/bilan. Enfin, une étude fine de la succession des fonctions utilisées dans une même phase7 permet de repérer un autre invariant: l’association des fonctions mutualisation/évaluation/bilan qui correspond à une reprise des réponses des élèves légèrement modifiée par l’enseignant pour s’approcher de la réponse qu’il attend (cf. « funel pattern », Bauersfeld 1980). Les buts illocutoires sont répartis de façon analogue pendant les phases d’élaboration d’une stratégie. Pendant la phase de correction nous constatons que l’enseignant semble demander davantage une mise en activité des élèves seuls, en quatrième qu’en troisième (52% de buts directifs exprimés en 4° pour 43% en 3°). Nous avons déjà indiqué que le type de correction organisé en 4° engage davantage les élèves à répondre aux questions posées puisqu’ils n’ont pas encore, pour la plupart, résolu l’exercice. Cependant en 3°, cette minoration de la mise en activité des élèves, seuls, est compensée par une co-implication des élèves et du professeur par le but commissif/ directif; finalement, les buts qui expriment globalement une mise en activité des élèves et ceux qui expriment une prise en charge par le professeur sont très similaires dans les deux classes et pour les deux phases. 3.2.4 Bilan La stabilité des pratiques de cet enseignant se marque fortement dans la dimension médiative, même si on peut penser qu’elle tient aussi à un projet de gestion développé a priori: la mise en activité des élèves est déclinée en différentes phases qui sont analogues dans les deux classes, y compris dans leur succession. Ainsi, après un premier temps de travail sur la figure et sur la question en jeu dans l’exercice, une deuxième phase est consacrée à recenser collectivement les différentes méthodes, précédée éventuellement d’une recherche individuelle. Le troisième temps, plus directif au début, aboutit à la mise en recherche autonome des élèves selon un plan très 7
Cf. Vandebrouck (à paraître).
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M. Pariès et al.
Tableau 5 Répartition des fonctions du discours en 4° et 3°, selon la phase de travail Fonctions
4° Elaboration stratégie
3° Elaboration stratégie
4° 3° Correction Correction
Distribution des tâches Découpage en sous tâche Bilan Structuration Justification Evaluation Fonctions cognitives Engagement-Encouragement-Mobilisation attention (enrôlement direct) Mutualisation Fonctions d’enrôlement Total des occurrences
2% 10% 12% 17% 5% 16% 61% 23%
2% 12% 17% 7% 10% 17% 59% 17%
0% 12% 15% 15% 2% 12% 57% 20%
0% 11% 21% 16% 6% 19% 72% 19%
16% 39% 58
24% 41% 41
23% 43% 85
9% 28% 141
formaté, construit par l’enseignant à partir des interventions des élèves (améliorées). La dernière phase est une correction, très guidée. L’invariance tiendrait ainsi à cette organisation de la nature du travail proposé aux élèves par l’enseignant au fur et à mesure de la séance. En revanche la nature des sous-tâches mathématiques qui déterminent les activités précises possibles (notamment a minima) diffère: une fois que les stratégies sont mises en place, les élèves de quatrième peuvent davantage en rester à des tâches simples et isolées (TSI) successives à partir de leurs théorèmes qu’en troisième. Dans les deux classes, l’utilisation globale des fonctions du discours est similaire, l’expression des buts comparable. Le discours de l’enseignant semble donc avoir la même visée, dans les deux classes étudiées: même enrôlement direct, même dévolution des tâches, même évaluation avec une répartition analogue des rôles des élèves et de l’enseignant. La recomposition des résultats précédents permet de dégager une certaine logique des interventions de cet enseignant, analogue dans les deux niveaux. En particulier, indépendamment de la tâche précise, l’enseignant semble habituer les élèves à se poser la question de la démarche à mettre en œuvre avant de se lancer dans la résolution proprement dite. Cela dit, les élèves peuvent raccrocher individuellement le travail à divers moments: ceci est renforcé par une utilisation assez uniforme des fonctions et des buts. Soulignons qu’un entretien réalisé avec cette enseignante après la vidéo de troisième nous permet de confirmer qu’elle revendique les caractéristiques de la gestion que nous avons dégagées, les considérant comme habituelles et réitérées – sauf en ce qui concerne les fonctions et les buts, dont elle ne peut pas avoir une conscience fine. La comparaison troisième, quatrième amène enfin à se demander si l’invariance du déroulement n’a pas comme effet sur une tâche plus difficile un plus grand découpage en Tableau 6 Buts illocutoires
Assertif Directif Commissif/Directif Expressif Déclaratif
4° Elaboration stratégie
3° Elaboration stratégie
4° Correction
3° Correction
40% 50% 6% 4% 2%
42% 46% 7% 2% 2%
47% 52%
46% 43% 5% 3% 2%
2%
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tâches isolées, voire simples. Peut-être l’enseignant compense-t-il la difficulté par le découpage du déroulement et l’enrôlement des élèves, qui remplace la mutualisation de leurs réponses.
4 Discussion et conclusion 4.1 Bilan sur la stabilité des pratiques de chaque enseignant et limites Nous avons comparé des pratiques d’enseignants dans des séances similaires: dans le premier cas il s’agit de la même séance, portant sur plusieurs exercices sur la divisibilité et la division, travaillés après la donnée en cours de critères de divisibilité; dans le deuxième cas, il s’agit d’exercices de géométrie visant à étudier une figure en utilisant le théorème qui vient d’être exposé en cours. Dans chaque cas, les tâches précises proposées aux élèves sont assez variées: il y a des reconnaissances de modalité d’application, des mélanges avec des connaissances anciennes, des étapes ou des intermédiaires à introduire, des choix de méthodes. On voit apparaître des stabilités pour chaque enseignant: l’organisation des déroulements (formes de travail effectives) et nature des différentes phases de travail successives proposées à partir des tâches prévues, sur des durées de l’ordre d’une dizaine de minutes, se retrouvent sans beaucoup de variation. Des sous-tâches peuvent ou non être introduites par des aides procédurales qui ne sont pas toujours les mêmes selon les séances. Il y a peu d’aides constructives dans les deux cas. Dans le discours, les buts illocutoires sont très stables pour chaque enseignant, renforçant les invariances des déroulements et traduisant peut-être la cohérence de l’enseignant, à l’origine des choix répétés, cohérence associée à la visée (inchangée selon les contextes) de son enseignement. Les fonctions du discours sont relativement stables elles-aussi, quelques-unes, plus variables que d’autres, sont associées aux adaptations que l’enseignant s’autorise à partir de son projet. Schématiquement par exemple, la part d’enrôlement direct repérée dans des classes faibles ou pendant un exercice jugé difficile, semble être compensée dans une classe plus forte ou pour un exercice plus facile par des mutualisations. Les deux cas étudiés illustrent deux occurrences différentes de la stabilité recherchée: si le choix de tâches identiques pour des classes de même niveau est attendu, en revanche la stabilité des déroulements et des discours alors même que les classes sont différentes est un vrai résultat (cf. PC); en ce qui concerne DD, la stabilité des déroulements dans deux classes de niveau scolaire différent et pour des tâches n’engendrant pas, a priori, les mêmes activités élèves, nous semble presque encore plus significative. Cependant le nombre de professeurs analysés demande à être augmenté – ainsi que le nombre et la nature des séances comparées pour un enseignant. 4.2 Conséquences et Perspectives Les questions de la contribution de cette stabilité des pratiques d’un enseignant aux apprentissages des élèves sont donc légitimes et des conséquences sur les activités possibles des élèves peuvent être précisées par l’étude amorcée ci-dessus. Les activités des élèves (Tableau 7) s’inscrivent ainsi vraisemblablement plus d’une fois dans des découpages analogues, initiés par le professeur: il peut y avoir des effets de répétition, différents selon les élèves. On peut donner, à partir de nos résultats, quelques exemples de tels effets possibles à long terme.
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Si l’enseignant suggère lui-même, à chaque fois, de commencer un exercice de géométrie par la recherche d’une stratégie, sans aide constructive, est-ce que tous les élèves vont s’approprier cette démarche? Des formes de travail installées par l’enseignant comme une recherche individuelle courte ou pas de recherche entraînent des activités « a maxima » visibles ou non de certains élèves. D’autres en seront-ils toujours exclus? Certaines corrections très dirigées ne laissent pas de place aux questions des élèves encore très éloignés de la résolution après leur recherche individuelle: ces élèves resteront-ils toujours à leur doute sur la validité de leur solution? Pourront-ils se servir de ce qu’ils ont recopié? De plus, certaines activités attendues pourraient n’être jamais possibles si la gestion habituelle de l’enseignant était contradictoire avec le déroulement nécessaire: ainsi si un travail long, autonome ou en petits groupes, n’est jamais organisé, on peut se demander si des élèves pourront imaginer seuls des étapes dans un exercice complexe. De même, si la succession des activités est invariable, les variations ou détours qui, seuls, pourraient engendrer chez certains élèves une entrée dans les activités attendues leur manqueraient toujours. La question d’une évolution des pratiques intra-individuelles se pose aussi. Mieux connaître la stabilité des pratiques d’enseignants expérimentés peut permettre de mieux adapter certaines formations continues en élucidant davantage les liens entre tâches, activités attendues et gestion adaptée (ou non). Ainsi, certaines tâches peuvent « résister » mieux que d’autres à des gestions variées, au sens où les activités correspondantes des élèves sont peu affectées par la diversité des déroulements: nous suggérons que ces tâches, qu’on pourrait appeler robustes, sont utiles en formation, d’autant plus qu’en ce qui concerne le langage utilisé par les enseignants, la marge de manœuvre est très limitée a priori. On peut aussi se demander quels invariants sont partagés par plusieurs (de nombreux) enseignants, ce qui amène à questionner les contraintes sociales et les alternatives personnelles, et donc, peut-être, à ajuster encore autrement les formations. Enfin, les analyses de l’organisation des « lessons studies » de l’enseignement primaire au Japon (Hiebert et al. 2000) nous amènent à penser que les déterminants qui relèvent de l’ordre du collectif dans notre approche pourraient être des leviers d’une certaine transformation des pratiques des enseignants.
Annexe Tableau 7 Annexe Tâches et activités des élèves dans les trois classes 6°1 Tâche no. 1
6°2
6°3
Combiner, pour chaque nombre, de manière indépendante les critères de divisibilité par 2, 3, 5 et 9 (A1). Remplir le tableau dessiné par l’enseignant (A1).
Activités Un élève recopie au mathématiquesproposées tableau les résultats qu’il par l’enseignanta et a trouvés en les justifiant activités possibles les autres écoutent et corrigent éventuellement sur leur cahier.
Les deux élèves interrogés Quand un nombre a été complètent le tableau, envisagé, le barrer de la selon leurs cahiers. Les liste autres élèves regardent, Deux élèves se succèdent répondent aux questions au tableau pour proposer éventuelles concernant leurs solutions, les autres leur production puis regardent commentent les résultats
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Tableau 7 (continued) 6°1 Tâche no. 1
6°2
6°3
Combiner, pour chaque nombre, de manière indépendante les critères de divisibilité par 2, 3, 5 et 9 (A1). Remplir le tableau dessiné par l’enseignant (A1).
Tâche no. 2
Tâche no. 3
écrits: ce qui manque, ce qui est faux. Le professeur vérifie le travail de chaque élève. Participer au bilan orchestré par les questions de Rappeler le critère de faible portéeb de l’enseignant: divisibilité par 3 – Repérer les « fautes », Donner la somme des les manques chiffres de 135. Donner les nombres qui apparaissent à toutes les Dire si 9 est dans la table lignes; de 3. Justifier pourquoi 950 est divisible par 2. Dire pourquoi un nombre dont le chiffre des unités est 0 est divisible par 2. Reconnaître si 950 est multiple de 3, multiple de 5. – Justifier pourquoi 79 Examiner les critères de n’est sur aucune ligne divisibilité successivement du tableau (A1) indiqué pour 5 208 puis pour 360. (A1→TSI) Donner le quotient et le reste de la division de 79 par 79 puis 1. (A1+Ancien) (Après que le professeur a donné le quotient et le reste de la division de 79 par 79.) (Ancien→TSI) Utiliser conjointement et/ou négativement tous les critères de divisibilité (A1) Introduire un nombre quelconque (A2) puis appliquer tous les critères ( A1 et A6) Trouver un nombre simple qui ne soit divisible ni par 2, ni par 3, ni par 5, ni par 9 mais qui soit divisible par autre chose que lui même et 1. (A2, A1, A6) Se rappeler de ce qui Selon les propositions des Selon les propositions des a été évoqué la veille: élèves, justes ou fausses, élèves, justes ou fausses, le professeur réfute (cas 49 et 77 le professeur ajoute la des nombres premiers) recherche de nombres premiers à deux chiffres (A2, A1, A6) Ne demande de justifier que lorsque la proposition est fausse (nombres divisibles par 2 ou 3) laisse sans validation une proposition d’un nombre trop grand. Effectuer des divisions: utiliser des connaissances du primaire (A3). « Les continuer après la virgule jusqu’à ce qu’on puisse dire quelque chose »: adaptation de type A7 Utiliser l’algorithme de la division Notamment savoir Les élèves effectuent des De nombreux élèves déterminer le nombre de divisions correctement ou éprouvent de la difficulté chiffres à considérer au non. Le professeur devant les calculs à départ au dividende. indique très rapidement: effectuer. Ils doivent
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Tableau 7 (continued) 6°1 Tâche no. 1
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Combiner, pour chaque nombre, de manière indépendante les critères de divisibilité par 2, 3, 5 et 9 (A1). Remplir le tableau dessiné par l’enseignant (A1). (A3) Les élèves effectuent des divisions correctement ou non.
dans 13: 52 mettre 0 et répondre aux questions une virgule et on fait 130 éventuelles du professeur :52. (TSI) sur le détail des calculs pendant qu’il évalue le travail individuel (TSI) Pendant la correction au tableau: Suivre les calcul du professeur au tableau et intervenir à la demande: résultat d’une soustraction, d’un produit...(A 3→TSI) pas de A7. Trouver ce qu’on peut dire du quotient de 341 par 3 lorsque le reste, à partir d’un certain moment, est toujours 2. (A3) Dire quelles sont les deux catégories de divisions.(A7) Faire la distinction entre quotient entier et quotient exact. a
Rappelons les codes en gras: TSI=tâche simple et isolée, adaptations, A1=reconnaissance de modalités d’application, A3=mélange de plusieurs cadres, A6=existence de choix, A7=vers la nouveauté. Les connaissances travaillées indiquées au paragraphe a) sont les caractères de divisibilité et les divisions.
b
Demandant des réponses courtes si ce n’est réduites à un mot (nombre).
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