Materials and Structures/Mat6riaux et Constructions, 1990, 23, 103-109
Durabilit6 au gel des Mtons de hautes performances m&aniques RICHARD GAGNt~*, MICHEL PIGEON*, PIERRE-CLAUDE AITCIN* *Groupe de recherche en technologie du b~ton, ~D~parternent de Gdnie Civil, Universitd Laval, Sainte-Foy, Quebec, GIK 7P4, Canada Ce texte prdsente les principaux rdsultats d'une #tude entreprise dans le but de mieux comprendre comment se comporte le bdton H.P. face aux cycles de gel-ddgel. Le bdton H. P. est un mat#riau nouveau et il n' est pas encore possible d'dvaluer en nature sa capacit# gl r#sister aux attaques du gel et des sels de ddglafage. A l' Universit# Laval, la durabilit# de bdtons H. P. (80-100 MPa) a 6tOanalysde en les soumettant en laboratoire d des cycles rapides de gel-ddgel dans l'eau (AS TM C666) et d des cycles de gel-ddgel journaliers en pr#sence de sels de d#glagage en solution (ASTM C672). Aucune des #prouvettes fabriqudes n' a #t# d#truite par les cycles de gel-d#gel et toutes ont bien r#sist# fi l'attaque des sels ddgl_afants, si bien que les diff #rentes variables que nous avons #tudides (rapport eau-liant, L, cure) n'ont pas influencd la performance au gel de ces bdtons. C'est l' emploi d'un ciment H. P. d grains fins avec 6% de fumde de silice et l'utilisation de rapports eau-liant relativement faibles (<0,30) qui sont d la base de la durabilit# de ces bdtons.
1. INTRODUCTION Gr&ce a l'utilisation des superplastifiants, des ajouts min6raux et des ciments Portland hautes performances, il est maintenant possible de fabriquer en usine des b6tons dont le rapport eau/liant est tr~s faible (E/C <0,30) et qui peuvent atteindre des r6sistances en compression sup6rieures ~ 100 MPa [11. De plus en plus cependant, les utilisateurs de b6tons hautes performances se demandent s'il est n6cessaire d'utiliser de l'air entrain6 pour prot6ger ce b6ton contre ies cycles de gel-ddgel et l'6caillage dfi aux sels d6glaqants. L'air entrain6 nuit ~ la r6sistance en compression du b6ton et par cons6quent on doit compenser cette r6sistance plus faible en abaissant un peu plus le rapport E/C ce qui, 6videmment, entraine des coots de fabrication plus 61ev6s. C'est dans la construction des structures multi6tag6es, pour lesquelles les probl6mes de durabilit6 sont mineurs, que se retrouvent la plupart des utilisations commerciales des b6tons de hautes performances. Le factehr durabilit6 ne peut cependant pas 6tre n6glig6 dans le cas de la construction de viaducs sophistiqu6s et (6ventuellement) des futurs rev6tements routiers, en raison de leur forte exposition aux cycles de gel-d6gel et aux sels d6gla~ants. Le b6ton de hautes performances 6tant un mat6riau nouveau, il n'est pas encore possible d'6valuer en nature sa capacit6 h r6sister aux attaques du gel et des sels de d6gla~age. A l'Universit6 Laval, des 6tudes en laboratoire ont 6t6 entreprises afin de mieux comprendre comment se comporte ce type de b6ton face aux cycles de gel--d6gel. Ce texte a pour objectif d'exposer les r6sultats de la premi6re phase d'un programme de recherche visant ~a 6tudier la durabilit6 de b6tons de hautes performances 0025-5432/90 9 RILEM
(HP) et ~ d6terminer quels sont les principaux facteurs qui peuvent influencer cette durabilit6 (temps de cure, teneur en air, type de ciment ou de granulat, fum6e de silice). La durabilit6 des b6tons HP a 6t6 analys6e d'une part en les soumettant en laboratoire h des cycles de gel-d6gel dans l'eau (ASTM C-666 proc. A) et d'autre part en les soumettant ~ des cycles de gel-d6gel en pr6sence de sels de d6gla~age en solution (ASTM C-672) [21. 2. RECHERCHES A L'UNIVERSITI~ LAVAL A l'Universit6 Laval nous avons entrepris, depuis quelques ann6es, l'6tude en laboratoire de la durabilit6 du b6ton face aux cycles de gel-d6gel dans l'air ou dans l'eau ou encore face aux cycles de gel-d6gel avec, & la surface du b6ton, des sels de d6glaqage en solution. Grfce h la technique du facteur d'espacement critique des bulles d'air, on a pu faire ressortir de fa~on relativement pr6cise l'influence de plusieurs facteurs sur la durabilit6 du b6ton (fum6e de silice, rapport E/C, temps de cure, milieu de gel). Cette technique consiste tester, dans des conditions d'essais donndes, plusieurs m61anges fabriqu6s de fa~on identique mais poss6dant un r6seau de bulles d'air diff6rent (facteur d'espacement des bulles variable). Le facteur d'espacement des bulles d'air (L) est d6fini par la norme ASTM C-457 et repr6sente approximativement la demi-distance moyenne entre les parois de deux bulles d'air voisines. Suite aux essais de gel-d6gel, on d6termine la valeur du facteur d'espacement requise pour prot6ger le b6ton contre l'attaque des cycles de gel-d6gel (Lcrit)- Plus un b6ton poss6de un facteur d'espacement critique 61ev6, plus il est en mesure de r6sister aux cycles de gel-d6gel
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G a g n 6 et al.
Tableau 1 Facteurs d'espacement critiques Facteur d'espacement critique (/xm) E (C + FS) 0,50 0,30 0,25
B6ton avec FS
B6ton sans FS
Cycles darts l'air
Cycles dans l'eau
Cycles darts l'eau
400 400h500 -
250 300 -
500 400 750
sans qu'il soit n6cessaire de lui fournir un important r6seau de bulles d'air. On a repr6sent6 au Tableau 1 quelques valeurs du facteur d'espacement critique obtenues en fonction du rapport E/(C+FS), du milieu de gel et de la teneur en fum6e de silice (FS). On constate d'abord que le milieu de gel n'a que tr~s peu influenc6 les Lcrit- I1 n'a donc que peu d'effet sur la durabilit6 des b6tons 6tudi6s. On peut aussi remarquer que les b6tons sans fum6e de silice semblent plus durables puisque leurs facteurs d'espacements critiques sont plus 61ev6s lorsque soumis h des cycles de gel-d6gel dans l'eau. L'effet du E/C sur la durabilit6 des b6tons est moins 6vident. Pour les b6tons avec de la fum6e de silice, test6s dans l'air et dans l'eau, la r6duction du E/C de 0,5 h 0,3 n'a que tr6s 16g6rement augm_ent6 les performances au gel car, en moyenne, les t c r i t n'ont augment6 que d'environ 50/zm. Dans le cas des b6tons sans fum6e de silice, cette m6me r6duction du E/C a par contre nui h la durabilit6. I1 faut r6duire le E/C jusqu'h 0,25 pour cette lois mesurer une nette augmentation de la durabilit6 (Lc~it = 750/zm). Alors que la r6duction devrait en principe augmenter la durabilit6, on constate ici que ce n'est pas toujours le cas. A l'Universit6 Laval, quelques hypoth6ses mettant en 6vidence les r61es d6terminants de la perm6abilit6 et de la quantit6 d'eau gelable ont d6j~ 6t6 6nonc6es pour expliquer ce ph6nom6ne. Un projet de recherche consacr6 sp6cifiquement ~ la durabilit6 des b6tons HP a d6but6 il y a quelque temps et permettra sans doute de v6rifier ces hypoth6ses tout en permettant une meilleure compr6hension de l'action du gel sur ce type de b6ton. La r6sistance h l'6caillage des b6tons de rapports E/C faibles est un domaine encore mal connu. A l'Universit6 Laval, une s6rie d'essais pr61iminaires a pu montrer que des b6tons sans air entrain6 poss6dant un E/C de 0,25 et mfiris 14 jours peuvent pr6senter une r6sistance l'6caillage excellente, aussi bonne que celle de bons b6tons standard avec air entrain& II semble que la tr6s faible perm6abilit6 de la p~te soit h l'origine de cette durabilit6 remarquable [3]. D'autres travaux doivent 6tre entrepris afin de pr6ciser davantage le r61e du rapport eau/liant, du facteur d'espacement, du mfirissement et de la fum6e de silice sur la durabilit6 des b6tons de hautes performances.
3. LE B~;TON DE HAUTES PERFORMANCES De nos jours, on sait de mieux en mieux comment fabriquer des b6tons dits 'de hautes performances m6caniques'. Cependant les connaissances en ce domaine sont encore limit6es et beaucoup de recherches restent h faire avant que ce type de b6ton soit utilis6 commercialement au moindre cofit possible. Deux grands principes sont a la base de la technologie des b6tons de hautes performances. I1 faut d'abord obtenir la pglte de ciment la plus r6sistante possible mais il faut aussi choisir de fa~on judicieuse le gros granulat qui entrera dans la fabrication du b6ton. Pour obtenir les pates de ciment les plus r6sistantes possible, il faut, c'est maintenant bien connu, abaisser au maximum le rapport E/C. En diminuant la quantit6 d'eau de gglchage, on rapproche les grains de ciment les uns des autres et on obtient une p~te plus dense et moins poreuse. Ce principe a toutefois ses limites car la pgtte ayant un rapport E/C tr6s faible manque de fluidit6 et le b6ton obtenu est si peu maniable qu'il devient impossible de le mettre en place en chantier. De nos jours, l'utilisation des superplastifiants a rendu possible la fabrication de b6tons fluides (affaissement de plus de 100 mm) dont le rapport E/C se situe entre 0,20 et 0,25 [1]. La r6sistance de la pglte est aussi fonction des propri6t6s chimiques et physiques du ciment. On connait encore plut6t mal quelles devraient 6tre les caract6ristiques physico-chimiques d'un ciment destin6 l'obtention de hautes r6sistances m6caniques. I1 semble que les ciments h grains fins et ~ haute teneur en C3S soient ceux qui permettent l'obtention des meilleurs r6sultats. L'emploi d'ajouts rnin6raux (fum6e de silice, cendres volantes), tout en n'6tant pas absolument n6cessaires, contribuent aussi ~ am61iorer les propri6t6s m6caniques et rh6ologiques des b6tons HP [1]. Le choix du gros granulat est particuli6rement important. Celui-ci doit avoir une r6sistance m6canique 61ev6e et son module d'61asticit6 doit 6tre le plus pr6s possible de celui du mortier qui l'entoure de fa~on h diminuer les d6formations diff6rentielles h l'int6rieur du b6ton. D'apr6s Aitcin [1], en Am6rique du Nord, les calcaires dolomitiques concass6s de f o r m e cubique et dont le diam6tre maximum est de 10 a 12 mm sont ceux qui permettent d'obtenir les meilleurs r6sultats.
Materials and Structures
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4. PROGRAMME DES ESSAIS I1 a EtE d6cid6, dans la premi6re partie du programme de recherche sur la durabilitE des bEtons de hautes performances, d'Etudier le comportement de bEtons fabriquEs en utilisant trois rapports eau/liant: 0,30, 0,26 et 0,23. Nous avons utilisE pour tous les melanges un ciment Portland ?ahaute resistance initiale (ASTM type III, CSA type 30). A~tcin [1] a montr6 que ce type de ciment permet d'obtenir des resistances en compression plus 61ev6es que les CPA usuels. Dans tousles bEtons fabriqu6s, on a remplac6 6% du ciment par de la fum6e de silice de fa~on h obtenir des r6sistances en compression plus 61ev6es (80 ~ 100MPa). Pour chacun des rapports E/L, nous avons utilis6 des dosages variables d'agent entralneur d'air ( A E A ) de fa~on a obtenir des facteurs d'espacement faibles (100 ~ 250tzm, avec A E A ) , mod6r6s (250 h 500/xm, petites doses d ' A E A ) ou 61ev6s (500 ~ 800/zm, sans A E A ) . En outre, nous avons choisi quatre temps de cure avant de soumettre les 6prouvettes aux essais normalis6s de gel-dEgel. Afin de representer plus fid61ement les conditions normales d'utilisation du b6ton, le mfirissement des 6prouvettes a 6t6 effectu6 en les enrobant de plusieurs 6paisseurs de film plastique Etanche. Cette op6ration fut rEalis6e apr6s avoir immergE dans l'eau les 6prouvettes fra]chement dEmoulEes pendant une p6riode de 2 h 3 min. Au total, 27 bEtons ont Et6 soumis aux essais de gel-d6get et d'6caillage (Tableau 2). Nous avons soumis t o u s l e s bEtons d'une part h des essais de gel-dEgel dans l'eau (ASTM C-666 proc. A) et d'autre part h des cycles de gel-d6gel en pr6sence de sels de d6gla~age (ASTM C-672). Nous avons choisi d'utiliser une solution de d6gla~age constitu6e de 2,5 g de NaCI par litre d'eau. On consid6re g6n6ralement que cette concentration est la plus dommageable pour le b6ton [4].
Le facteur d'espacement des bulles d'air de t o u s l e s melanges choisis a Et6 dEterminE selon la procedure d6crite dans la norme ASTM C-457 'Modified Point Count Method'.
5. MAT]~RIAUX, CARACTI~RISTIQUES DES MI~LANGES ET MI~THODES
EXPI~RIMENTALES Nous avons fabriquE tous les melanges de bEton 5 partir d'un ciment Portland ~ haute resistance initiale. La principale caractEristique de ce ciment est la grande finesse de ses grains (Blaine = 5 4 5 0 cm 2 g - i ) et sa haute tenear en C3S. Ceci lui permet de d~velopper tr~s rapidement d'excellentes resistances mEcaniques. Les proportions de ses principaux constituants sont: C3S = 63,0%, C 2 8 = 12,0%, C3A = 8,0%, C4AF = 5,4%. Une fumEe de silice, provenant de la region de B6cancour au QuEbec, a Et6 utilisEe en remplacement de 6% du ciment. Elle est constituEe de plus de 95% de SiOz et contient moins de 1% de carbone. Nous avons fabriquE tous les melanges ~ l'aide d'un sable granitique compos6 de particules de feldspath, de quartz et de gneiss granitique et dont le module de finesse est de 2,1. Nous avons utilis6 comme gros granulat un calcaire dolomitique tr~s dur provenant de la r6gion de Montr6al. La preparation des m61anges de b6ton a nEcessit6 l'emploi de deux types d'adjuvants. I1 s'agit d'un superplastifiant nommE Disal, ~ base de naphtal6ne formald6ide sulfon6e, fabriquE au Qu6bec par la compagnie Handy Chemicals, et d'un A E A nomm6 Microair, base de d6tergent synthEtique, fabriqu6 par Master Builders. On a rassembl6 au Tableau 3 les caract6ristiques des trois types de b6tons soumis au gel. Apr6s 28 jours de cure humide la resistance en
Tableau 2 Essais de gel-d6gel et d'6caillage* E/(C + FS)
0,30
0,30
0,30
0,26
0,26
0,26
0,23
0,23
0,23
L (/~m)
100h250
250h500
500~t800
100~250
250h 500
500~ 800
100~250
250 ~t500500 ~ 800
Cure(jours)
1,3,7,28
7,28
1,3,7,28
3,7,28
1,3,7,28
1,3,7,28
3,7
3,7
3,7
*27 conditionsd'essais.
Tableau 3 Caract6ristiques des b6tons E C + FS 0,30 0,26 0,23
Eau
Ciment
FS
G. fin
G. gros
Aft.
Air
SP*
AEA*
(kg m -3)
(kg m -3)
(kg m -3)
(kg m -3)
(kg m -3)
(mrn)
(%)
(ml kg -1)
(ml kg -1)
144 148 158
451 546 645
27 32 38
791 703 591
1041 1040 1025
45-90 75-130 30-55
2,8 ~t4,9 2,6 ~t4,9 2,5 ~ 3,9
28 38 52
0 ~2 0h2 0h3
*Lesdosagesd'adjuvants sont exprim6sen ml par kg de liant.
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Gagn6
etal.
Tableau 4 Rdsistance et teneur en air des bEtons E C + FS 0,30 0,26 0,23
REsistance en compression (MPa)
Teneurenair
78 ~ 87 90 ~t93 91 ~ 97
2,5 h 4,4 2,6/t3,6 2,5 b.2,8
compression du bEton a 6t6 mesurEe sur six cylindres de 100 x 200 mm (Tableau 4). Pour chaque rapport E/L nous avons observ~ une 16gEre variation de la resistance en fonction de la teneur en air. Pour chaque rapport eau/liant, plusieurs gglchEes ont 6t6 fabriquEes de fa~on identique, mais avec des dosages variables d ' A E A de maniEre ~ faire varier les caractEristiques du rEseau de bulles d'air. Dans le Tableau 3 nous avons jug6 utile d'inclure les plages de variation de l'affaissement, de la teneur en air et du dosage des adjuvants. I1 est important de noter qu'en raison des faibles rapports eau/liant, les dosages des adjuvants sont tous trEs 61ev6s (de 4 h 6 fois la dose recommandEe en usage normal). Pour chacune des 27 conditions d'essais, trois 6prouvettes de 75 x 100 x 400 mm ont ~t6 mises en place: deux pour les essais de gel-dEgel dans l'eau et une pour la determination des caract6ristiques d u r6seau de bulles d'air. De plus, deux 6prouvettes de 75 mm x 225 mm x 300 mm (dont on a simplement aras6 la surface ~ l'aide d'une truelle de bois) ont aussi 6t6 fabriquEes pour les essais d'~caillage. Sur ces derniEres, on a fix6 par la suite un rebord en caoutchouc qui permet de retenir ~ la surface un petit bassin d'eau (3 mm de prof.) contenant les sels en solution (NaC1 2,5 g 1-1). Une lois la cure des 6prouvettes de 75 mm x 100 mm x 400 mm termin6e, elles ont 6t6 immEdiatement immergdes dans l'eau et soumises ~ des cycles de gel ( - 18 h +4~ selon un taux de gel d'environ 8~ -1. Apr~s chaque tranche de 50 cycles les 6prouvettes ont 6re retirees de l'appareil afin de mesurer leur 6tat de fissuration par la mesure de l'allongement et de la vitesse des ondes ultrasoniques. Les 6prouvettes de 75 mm x 225 m m x 300 mm ont ~t6 soumises h une pEriode de 28 jours de s~chage en laboratoire avant de subir les cycles journaliers de gel ( - 2 0 ~ +20~ en presence de sels de d6gla~age. A tousles 5 cycles, on a recueilli, ~ l'aide d'un petit tamis, les debris qui se sont dEtach6s de la surface et on a dEtermin6 leur poids total.
(%)
6prouvettes par les cycles de gel-dEget [5]. Si, apr~s 300 cycles, l'allongement devient supErieur ~ environ 200 x 10 -6, on consid~re que le bEton est, ~ plus ou moins long terme, susceptible de se dEtruire [6]. Cet allongement de 200 x 10 -6 ou moins peut s'expliquer par une 16g~re absorption d'eau lors des pEriodes de dEgel et par la difference entre les coefficients de dilatation thermique de la pfite et des granulats. II est 6vident que la valeur limite de 200 x 10 - 6 est fonction des caractEristiques des melanges et de la nature des matEriaux utilisEs. Dans la pr6sente Etude, considErant la forte teneur en ciment des melanges, nous pensons que si, apr~s un minimum de 300 cycles, l'allongement demeure infErieur ~ environ 500 x 10 -6, il est raisonnable de conclure que le b6ton est parfaitement en mesure de resister aux cycles de gel-dEgel. La fissuration rEduit la vitesse de transmission des ondes ultrasoniques. La mesure de cette vitesse est donc aussi un bon indice de la deterioration des 6prouvettes. La vitesse des ondes ultrasoniques, exprimEe en pour~ centage de la vitesse mesurEe ~ 0 cycle, vient donc confirmer les informations tirees des mesures de l'allongement. En general, lorsqu'apr~s 300 cycles la vitesse devient inf~rieure ~tenviron 90% de la vitesse initiale, on consid~re que le bEton est en voie de destruction [7]. En observant le Tableau 5 on constate qu'en aucun cas, l'allongement des 6prouvettes n'a d6pass6 la valeur de 542 x 10 -6. I1 faut noter que, pour la majorit6 des cas, les essais ont 6tE prolongEs largement au del~ de 300 cycles et dans certains cas jusqu'~ plus de 1000 cycles. Toutes les 6prouvettes de bEton testEes ont donc parfaitement bien rEsist6 aux cycles de gel-dEgel. Ces rEsultats sont confirmEs par la mesure des vitesses de transmission des ondes qui sont toutes supErieures ~t 100%. Les 6prouvettes, au lieu d'&re fissurEes par les cycles de gel, se sont au contraire densifiEes en poursuivant 16gErement leur hydratation. La vitesse, ~ la fin des cycles, a donc dEpass6 la valeur au debut des cycles.
7. RI~SULTATS DES ESSAIS D'I~CAILLAGE
6. RI~SULTATS DES ESSAIS DE GEL-DI3GEL Les rEsultats des essais de gel-degel sont resumes au Tableau 5 oft on a re_prEsent~, pour chaque condition d'essai (E/(C + FS), L, temps de cure), l'Etat de deterioration des 6prouvettes. L'allongement (AL/L) est gEnEralement consider6 comme le meilleur indicateur de l'Etat de destruction des
Nous avons rassembl6 au Tableau 6 les rEsultats des essais de gel-dEgel en presence de sels de dEglaqage en solution. Pour chaque condition d'essai, on retrouve la masse totale des debris qui se sont detaches de la surface apr~s 50, 100 et 150 cycles de gel. Toutes les 6prouvettes ont tr~s bien resist6 aux cycles d'Ecaillage puisque, apr~s 50 cycles, la masse totale des
Materials and Structures
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Tableau 5 Allongement et vitesse des ondes ultrasoniques E C + FS
Temps de cure (jours)
Facteur d'espacement (/zm)
Nombre de cycles
Allongement ~ la fin Vitesse des ondes des cycles ultrasoniques
(AL/L X 10-6)
(% Vo)
0,30
1 1 3 3 7 7 7 28 28 28
255 802 255 802 216 318 817 216 318 817
760 821 750 809 608 486 1013 300 300 304
275 425 259 542 226 201 184 319 293 378
103 106 104 103 102 101 104 100 101 102
0,26
1 1 3 3 3 7 7 7 28 28 28
182 730 285 384 744 285 384 744 285 384 744
760 719 679 1151 966 657 934 944 895 1100 295
259 227 228 258 217 283 302 265 390 398 326
103 104 101 105 103 103 104 103 102 103 100
0,23
3 3 3 7 7 7
170 457 778 170 457 778
1162 898 906 1137 872 1171
317 338 396 403 347 413
105 103 104 102 103 103
d6bris recueillis est demeur6e tr6s faible. M6me apr6s 150 cycles, le pire r6sultat obtenu ~ ce jour (0,49 kg m -2) est de loin inf6rieur a la limite de 1 kg m -2 apr6s 50 cycles sp6cifi6e par la norme norv6gienne [8]. Apr6s 50 cycles, la surface de toutes les 6prouvettes est demeur6e presque intacte. L'6caillage, lorsque pr6sent, 6tait tr6s souvent concentr6 au dessus d'un granulat situ6 juste sous la surface. La Fig. 1 montre, pour chaque rapport eau/liant, l'6volution de l'6caillage en fonction du n o m b r e de cycles pour les 6prouvettes les plus d6t6rior6es de m 6 m e que pour les moins d6t6rior6es. C o m m e on peut le constater, la d6t6rioration due ~ l'6caillage a 6volu6 de fa~on tr6s progressive, et m6me quasi-lin6aire, durant les 150 cycles. 8. DISCUSSION Aucune des 6prouvettes que nous avons fabriqu6es n'a 6t6 d6truite par les cycles de gel-d6gel dans l'eau. De plus, h ce jour, les diff6rentes variables que nous avons 6t-adi6es (E/(C + FS), L, cure) n'ont pas influenc6 la performance au gel des b6tons. L'utilisation d'un agent entraineur d'air, qui p e r m e t de baisser le facteur d ' e s p a c e m e n t des bulles d'air, n'est donc pas n6cessaire
p o u r prot6ger des cycles de gel-d6gel les b6tons que nous avons fabriqu6s. M~me le b6ton avec un rapport E/(C + FS) de 0,30, apr6s seulement 24 h de mflrissement et sans air entrain6, a 6t6 en mesure de r6sister plus de 750 cycles de gel~t6gel sans aucune d6t6rioration mesurable. Des recherches h l'Universit6 Laval [3] avaient d6jh montr6 que la r6duction du rapport E/C de 0,30 ~ 0,25 pouvait provoquer une augmentation de la durabilit6 de b6tons mfiris pendant 14 jours. Cependant, certains b6tons sans air entrain6, poss6dant un facteur d'espacement 61ev6, s'6taient quand m6me compl~tement d6truits apr6s 300 cycles de gel-d6gel (AL/ L > 3000 x 10-6). Pour garantir la bonne tenue au gel des b6tons avec rapport E/C de 0,30 et 0,25, les auteurs avaient alors sugg6r6 d'utiliser un A E A , c o m m e on le fait avec les b6tons plus communs. I1 existe une diff6rence importante entre les b6tons analys6s dans cette derni6re 6rude et ceux que nous avons fabriqu6s. Les r6sistances en compression obtenues par Foy etal. [3] sont, compte tenu des E/C utilis6s, relativement faibles (60 a 70 MPa) comparativement ceUes que nous avons pu obtenir avec les m6mes rapports E/C (80 5 9 0 M P a ) . Cet 6cart s'explique
108
Gagn6 et al.
Tableau 6 Ecaillage des 6prouvettes E C + FS
Temps de cure (jours)
Facteur d'espacement, L (/zm)
Masse des d6bris apr6s 50 cycles (kg m -2)
Masse des d6bris apr6s 100 cycles (kg m -2)
Masse des d6bris apr6s 150 cycles (kg m -2)
0,30
1 1 3 3 7 7 7 28 28 28
255 802 255 802 216 318 817 216 318 817
0,08 0,04 0,04 0,02 0,15 0,15 0,06 0,12 0,05 0,09
0,13 0,06 0,05 0,03 0,30 0,18 0,11 0,32 0,13 0,20
0,19 0,09 0,10 0,05 0,43 0,25 0,17 0,49 0,18 0,32
0,26
1 1 3 3 3 7 7 7 28 28 28
182 730 285 384 744 285 384 744 285 384 744
0,05 0,02 0,02 0,05 0,05 0,03 0,04 0,05 0,04 0,04 0,03
0,09 0,06 0,03 0,09 0,10 0,04 0,08 0,09 0,08 0,06 0,05
0,14 0,08 0,06 0,16 0,12 0,05 0,15 0,15 0,17 0,09 0,07
0,23
3 3 3 7 7 7
170 457 778 170 457 778
0,07 0,01 0,05 0,03 0,02 0,02
0,12 0,03 0,15 0,09 0,04 0,05
0,23 0,04 0,25 0,14 0,05 0,08
0.6 0.5 0.4
.~
0.3
9~
0.2 0.I
0
50
100
Nombre de cycles Fig. 1 Evolution de l'6caillage en fonction du nombre de cycles E/(C + FS) = 0,23: (8) 3 jours, 778/zm; (0) 7 jours, 457/zm. E/(C + FS) = 0,26: (V) 7 jours, 285/zm; (o) 28 jours, 285/xm. E/(C + FS) = 0,30: (n) 3 jours, 802/xm; (A) 28 jours, 216/zm.
150
M a t e r i a l s and S t r u c t u r e s probablement par les caract6ristiques diff~rentes des mat6riaux utilisds (ciment HP ou ciment normal, nature des granulats). Les pgtes de ciment que nous avons obtenues sont de meilleure qualit6. Elles ont vraisemblablement une tr6s faible porosit6 capillaire et donc une faible quantit6 d'eau en mesure de geler. La r6sistance en tension tr6s 61ev6e est aussi fi consid6rer puisqu'elle permet sans doute de mieux r6sister aux pressions internes cr66es par le gel. L'6caillage des 6prouvettes de b6ton HP que nous avons fabriqu6es a 6t6 dans t o u s l e s cas, largement inf6rieur ~t la limite de 1 kg m -2 (50 cycles) fix6 par la norme norv6gienne [8]. Encore une fois, aucune des variables que nous avons choisies n'a sembl6 influencer les performances ~ l'6caillage. A l'Universit6 Laval, plusieurs travaux ont d6j~ montr6 que des b6tons de rapport E/C plus courant (0,45), poss6dant un facteur d'espacement 61ev6 (400/xm), se seraient sans aucun doute 6caill6s tr6s s6v6rement dans les m6mes conditions. On a d6j~ mesur6 plus de 5 kg de d6bris par m2: Une premi6re s6rie d'essais r6alis6e par F o y e t al. [3] avait pu montrer que la r6sistance g l'6caillage de b6tons sans air entrain6 d'environ 70 MPa, avec un E/C de 0,25 et mfiris 14 jours, 6tait excellente. Nos essais ont confirm6 ces r6sultats mais ils montrent aussi qu'apr6s seulement 1 jour de mfrissement un b6ton HP avec un E/(C + FS) de 0,30, sans air entraln6, est parfaitement en mesure de r6sister h plus de 100 cycles d'6caillage en laboratoire. La grande imperm6abitit6 de la pfite des b6tons HP a probablement limit6 la saturation en surface et r6duit la p6n6tration des ions chlore, qui sont vraisemblablement ~ la base de la destruction par 6caillage des surfaces. 9. CONCLUSION Les r6sultats de la premi6re phase de notre programme de recherche montrent qu'il est possible de fabriquer des b6tons HP sans air entrain6 qui poss6dent une excellente durabilit6 face aux cycles de gel et d'6caillage. L'emploi d'un ciment HP, ~ grains fins et de haute teneur en C3S, a permis d'obtenir des r6sistances en compression 61ev6es (80 ~ 100MPa), mais il a aussi contribu~ ~ l'obtention de b6tons poss6dant une durabilit6 au gel exceptionnelle. A notre avis deux ph6-
SUMMARY Frost resistance durability of high-strength concretes This text presents the main results of research carried out towards a better understanding of the behaviour of high-strength concrete subjected to freeze-thaw cycles. High-strength concrete is a new material and it is not yet possible to assess its in situ capacity to resist attack by frost and de-icing salts. The durability of 80-100 MPa high-strength concrete has been analysed at the University Laval, subjecting it
109 nom6nes sont probablement ~ la base de cette excellente durabilit6: la faible porosit6 qui limite la quantit6 d'eau gelable et diminue donc les pressions internes qui peuvent se d6velopper lors du gel et l'imperm6abilit6 qui nuit fl la saturation de la pfite en surface et r6duit la p6n6tration des ions chtore. D'autres essais sont en cours afin de faire ressortir le r61e de la fum6e de silice et des granulats. Nous envisageons aussi de r6p6ter certains essais en utilisant d'autres types de ciment pour la fabrication des 6prouvettes, car il n'est pas 6vident quetous les ciments permettent de fabriquer des b6tons HP qui peuvent r6sister au gel sans l'aide de l'air entrain&
RI~FI~RENCES 1. Aitcin, P.-C., 'La technologic des b6tons 5 tr6s haute performance en Am6rique du Nord', Materi. Struct./ Matdr. Constr. 20 (1987) 180-189. 2. ASTM, 'Annual Book of ASTM Standards (1977) Part 14: Concrete and mineral aggregates' (American Society for Testing and Materials, Philadelphia, 1977). 3. Foy, C., Pigeon, M. et Banthia, N., 'Freeze-thaw durability and deicer salt scaling resistance of a 0.25 water-cement ratio concrete', Cem. Concr. Res. 18 (1988) 604-614. 4. Verbeck, G. J. et Klieger, P., 'Studies of "Salt" Scaling of Concrete', Highway Research Board Bulletin No. 150 (1957) pp. 1-13. 5. Pigeon, M., Pr6vost, J. et Simard, J.-M., 1985, 'Freezethaw durability versus freezing rate', ACI Y. Proce. 82(5) (1985) 684-692. 6. Pigeon, M., Pleau, R. et Aitcin, P.-C., 1986, 'Freeze-thaw durability of concrete with and without silica fume in ASTM C 666 (Procedure A) test method: internal cracking versus scaling', Cem. Concr. Aggreg. 8(2) (1986) 76-85. 7. Pigeon, M., Gagnr, R. et Foy, C., 'Critical air void spacing factors for low water-cement ratio concretes with and without condensed silica fume', Cem. Concr. Res. 17 (i987) 896-906. 8. Petersson, P. E., 'The influence of silica fume on the salt frost resistance of concrete', in Proceedings of International Seminar on Some Aspects of Admixtures and industrial By-Products on the Durability of Concrete, G6teborg, Norway, 1986, p.10.
to quick laboratory freeze-thaw tests in water (ASTM C 666) and daily freeze-thaw cycles in de-icing salt solution (C672). None of the testpieces made was destroyed by the freeze-thaw cycles and all of them showed satisfactory resistance to attack by de-icing salts, so much so that the different variables studied (water:cement ratio, E cure) had no influence on the frost resistance of these concretes. It is the use of fine-grain high-strength cement with 6% silica fumes and of relatively low water:cement ratios (<0.30) which ensures the durability of these concretes.