Zoomorphologie 83, 89 108 (1976) - 9 by Springer-Verlag1976
Modifications ultrastructurales des glandes vesiculaires des Machilidae (Insecta, Thysanura) au cours des cycles de mue Jacques Bitsch et Claude Palevody Laboratoire d'Entomologie, 118 route de Narbonne, F-31077 Toulouse Cedex, France Re~u le 1 Octobre 1975 Ultrastructural Modifications in the Vesicular Glands of the Machilidae (Insecta, Tbysanura) during the Moulting Cycles
Summary. During the
period between apolysis and ecdysis, the vesicular glands show many important transformations which affect not only the cuticular ductules, but all the ceils. The cytoplasm of the glandular cells undergoes a partial autolysis, whereas other parts of the cells present a high secretory activity. Immediately after the apolysis the cellular reservoir empties and disappears almost completely; soon after, refills with secretion. The most interesting transformations concern each ciliary cell, always associated with a glandular cell. In the first phase of the moulting cycle, the dendrite of the ciliary cell grows a ciliumlike extension (= distal region of the dendrite), which penetrates into the corresponding ductule; the new intima of this ductule is laid around the cilium. At the same time, the proximal region of the dendrite forms a circular fold around the base of the cilium and begins to secrete a material which will form the end apparatus. This latter is finished during the second phase of the cycle. The third phase is characterized by the degeneration of the distal region of the dendrite and the circular fold. Thus, the end apparatus is not a secretion of the ductule-carrying cell, but of the ciliary cell. At the end of the moulting period, just before ecdysis, the vesicular gland again takes the structure characteristic of the intermoult: the reservoir of the glandular cell is very large; the cuticular apparatus is almost formed; the dendrite of the ciliary cells shows, at its apex, a short "cilium" (= ciliary region s. str.+ short distal region) surrounded by microvilli, free in the secretion of the reservoir.
A. Introduction Dans une note pr61iminaire publi6e en 1974 nous avons signal6 l'existence de glandes v6siculaires dans les segments pr6g6nitaux de l'abdomen des Machilidae et pr6sent6 leurs caract6ristiques essentielles; des d6tails compl6mentaires sur l'ultrastructure de ces glandes pendant l'intermue sont fournis dans un article s6par6 (sous presse). Nous nous proposons ici de rendre compte des profondes transformations que subissent les glandes v6siculaires au cours de la mue. Rappelons bribvement que ces glandes sont situ6es dans les coxites abdominaux, contre le bord interne de chacune des v6sicules coxales exsertiles. Ces glandes exocrines
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comportent chacune une centaine de cellules s6cr6trices et un canal commun d6bouchant vers l'apex du coxite. Les cellules glandulaires de grande taille sont pourvues chacune d'un vaste r6servoir o~ s'accumule une s6cr~tion. II existe ~galement d'autres types de cellules: les cellules fabriquant la cuticule du canal et des fins canalicules qui relient chaque r6servoir au canal commun; les cellules-enveloppes, entourant les pr6c6dentes et de structure tr~s voisine; enfin les ~ ceUules ciliaires>>, ~mettant un prolongement de type dendritique, dont le segment ciliaire baigne dans le r6servoir d'une cellule glandulaire. On salt que les Thysanoures, comme les Collemboles, continuent ~ muer apr6s acquisition de la matufit6 g6nitale. Dans l'esp6ce 6tudi6e ici et dans les conditions d'61erage utilis6es, un cycle de mue (d'une exuviation ~ la suivante) dure en moyenne 26 jours. Nous nommerons <~p6riode de mue>> l'intervalle de temps qui s'6coule entre le d6collement de l'ancienne cuticule (apolysis) et l'exuviation (ecdysis); elle a une dur6e de l'ordre de quelques jours. C'est pendant cette p6riode que la glande v6siculaire subit d'importants remaniements. B. Materiel at techniques Nos observations ont port~ sur des aduttes de Lepismachilistargionii(Grassi) r6colt6s aux environs de Toulouse, puis 61ev6s au laboratoire ~t une temp6rature constante comprise entre 18 et 20 ~ sous photop6riode naturelle; une humidit6 assez 61ev6e est maintenue dans les r6cipients d'61evage, o~ les insectes sont isol6s, afin de noter le moment de rexuviation. I1 est plus difficile de d6celer, sur l'insecte vivant, le moment du d6eollement de l'ancienne euticule; pour y parvenir on peut sectionner l'extr6mit6 d'un style abdominal, puis contr61er au microscope l'6tat du revStement cuticulaire au niveau de l'6pine terminale: Ces deux ph6nom~nes (apolysis et ecdysis) sont en pratique les seuls points de repute du cycle de mue, les variations individueUes de la dur6e du cycle (nous avons not6 des cycles variant de 17 ~ 34 jours pour des conditions climatiques identiques) ne permettant pas d'6tablir une chronologie absolue: Pour rep6rer avec plus de pr6cision le stade atteint par l'insecte au cours de la <
>,on peut examiner au microscope 61ectronique le t6gument dorsal du coxite et mesurer l'6paisseur de la nouvelle cuticule. Les techniques utilis6es dans le domaine de l'histologie et de la microscopie 61ectronique sont les mSmes que celles indiqu6es dans notre article sur la structure des glandes pendant rintermue. C. Observations Afin de mieux situer chronologiquement les transformations qui affectent la glande v6siculaire, nous d6composerons la p6riode de mue en trois phases, dont les caract~res pr&is ne pourront ~tre donn6s qu'h la suite de l'6tude ultrastructurale (voir p. 99 et fig. 18). Bornons-nous pour rinstant ~t signaler les changements visibles sur de simples coupes histologiques. Au cours de la phase I, qui suit imm6diatement l'apolysis, les r6servoirs des cellules glandulaires, jusque-l~ distendus par la s6cr6tion, se vident rapidement et se r6duisent au point de n'~tre plus reconnaissables. I1 en r6sulte une forte diminution de volume des cellules glandulaires et ainsi de la glande tout enti~re. La s6cr6tion se d6verse dans le canal commun off elle reste stock~e jusqu'au m o m e n t de l'exuviation. Pendant la phase 11 les r6servoirs commencent ~ se gonfler d'une nouvelle s6cr6tion, entrafnant une augmentation rapide de la taille des cellules glandulaires; l'appareil canaliculaire se reforme compl~tement. La phase 111 est marqu6e par un nouvel accroissement de taille des r6servoirs et par la d6g6n6rescence de structures transitoires observables seulement au microscope 61ectronique. Ainsi, avant m~me l'exuviation, qui marque la fin de la 3~me phase, la glande v6siculaire a pratiquement repris la forme et la structure qu'elle a pendant l'intermue.
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1. Modifications des cellules glandulaires Les variations de volume des cellules glandulaires au cours de la mue s'accompagnent de remaniements des structures cytoplasmiques. Au sein d'une m~me cellule certaines zones pr6sentent des signes d'activit6: REG abondant, pouvant former des empilements r6guliers; nombreuses mitochondries de petite taille; complexes golgiens (fig. 1). Par contre d'autres zones cytoplasmiques pr6sentent une tendance ~ la vacuolisation et la formation de nombreux lysosomes. Ces derniers peuvent se pr6senter sous forme de corps multiv6siculaires de grande taiUe, d'accumulation de corps pseudomy61iniques ou de corps denses plus ou moins h6t6rog~nes (fig. 1 et 2). La vacuolisation atteint parfois un degr6 extreme, la majeure partie de la cellule 6rant occup6e par des vacuoles de grande taille, confluentes, ayant un contenu finement granuleux. I1 appara~t ainsi que, d~s le d6but de la p6riode de mue, les cellules glandulaires subissent une autolyse partieUe qui, par recyclage des produits de r6sorption, pourrait permettre de nouvelles syntheses assurant une croissance rapide des cellules et une reprise de l'activit6 s6cr6trice. I1 est probable aussi que quelques cellules glandulaires, atteintes par une vacuolisation prononc6e, finissent par d6g6n6rer compl~tement. Certaines coupes montrent, h la p6riph6rie de la glande, quelques cellules probl6matiques. Leur cytoplasme est de m~me type que celui des cellules glandulaires, mais il est peu abondant; en outre les noyaux sont plus petits et plus allong6s, ils sont surtout plus riches en chromatine. Peut-~tre s'agit-il de cellules-souches, destin6es ~t reinplacer les cellules glandulaires d6g6n6r~es. Cependant nous n'avons jamais observ6 de mitose dans ces cellules, ni de stades interm~diaires de leur diff6renciation. Enfin la glande peut contenir des hdmocytes ~ granules, qui ont donc rfussi h traverser la lame basale. De tels h6mocytes ne sont pas rares dans les glandes en cours de mue; on peut penser qu'ils sont capables de phagocyter des fragments de cellules ayant subi une autolyse pr6alable. En tout cas nous retrouvons des h6mocytes autour de fragments tissulaires rejet~s avec l'exuvie du canal (voir plus loin).
11. Decollement de l'intima cuticulaire et formation d'une nouvelle cuticule Chez les insectes examin6s peu apr~s l'apolysis, les exuvies des canalicules se retrouvent toujours ~ l'int6rieur du canal commun de la glande; ils sont donc rejet6s rapidement hors de la cellule canaliculaire qui les avait fabriqu6s, peut-~tre chass6s par la vidange des r6servoirs. Les manchons terminaux, qui prolongent les canalicules et baignent normalement dans les r6servoirs des cellules glandulaires, glissent 6galement, malgr6 leur diam~tre beaucoup plus fort, dans les espaces laiss6s vides par le rejet des canalicules; ils se retrouvent eux aussi clans le canal commun (fig. 5). L'exuvie du canal est souvent aplatie et sa lumi~re semble vide, alors que l'espace exuvial s'est rempli de la s6cr6tion provenant des r6servoirs (fig. 3). Chez un desMachilis examin6s, des restes de cellules ont 6t6 observ6es autour de l'exuvie du canal et des canalicules, ~ l'int6rieur du nouveau canal (fig. 4). On distingue le cytoplasme de plusieurs cellules et aussi un ou plusieurs noyaux, selon le niveau des coupes. Ainsi, lors de l'ecdysis, quelques cellules entourant le canal et les canalicules (peut-~tre aussi quelques cellules glandulaires) se sont d6tach6es avec l'intima. Ces ceUules sont dans un 6tat de d6g6n6rescence avanc6e; elles montrent en particulier un volumineux corps de d6g6n6rescence qui ne paraR pas isol6 par une membrane li-
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Fig. 1. Cytoplasme d'une cellule glandulaire imm6diatement apr~s l'apolysis (phase 1 de la p6riode de mue). A gauche: un fragment de cytoplasme actif (saccules de reticulum granulaire, nombreuses v6sicules golgiennes ~ contenu moyennement dense, ribosomes libres); au milieu: plus~eurs lysosomes; ~t droite: une grande vacuole contenant de nombreuses v6sicules et des corps pseudomy6liniques (x 30.000) Fig. 2. Autre portion du cytoplasme d'une cellule glandulaire au m~me stade que sur la fig. 1. Au centre une grande v6sicule claire renfermant de nombreux corps pseudomy61iniques; en bas droite, cytoplasme actif riche en mitoehondries (x 18.000)
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Fig. 3. Coupe transversale du canal c o m m u n de la glande v~siculaire au d~but de la p6riode de m u e (phase 1). L'exuvie de l'ancien canal appara~t tr~s aplatie, sa lumi~re vide (----). Au contraire l'espace exuvial ( , ) est large et rempli de la s6cr6tion rejet6e par les r6servoirs des cellules glandulaires. La nouvelle intima ( i ) c o m m e n c e h se d~poser (x 4.200) Fig. 4. C o n t e n u du canal c o m m u n de la glande v~siculaire ~ la phase 1; la nouveUe intima (i) du canal est en d~but de d~pSt. Darts l'espace exuvial ( , ) on observe une masse tissulaire, qui comporte l'exuvie de l'ancien canal et de canalicules (---~); on volt encore u n <> (dg), u n n o y a u ( n ) et deux h6mocytes h granules ( h ) (x 5.300)
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Fig. 5. Contenu de l'espace exuvial ( , ) du canal commun de la glande, h la phase III: d6tail de l'exuvie d'un canalicule (---~) prolong6 par le manchon terminal (rot). A c e stade la nouveUe intima (i) est presque enti~rement d6pos6e (x 2.700)
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mitante. De plus on trouve vers la p6riph6rie de la masse tissulaire quelques cellules contenant de nombreux corpuscules denses; ce sont vraisemblablement des h6mocytes, qui participent sans doute ~ la phagocytose des 616ments ayant subi une autolyse pr6alable. La s6cr6tion de la nouvelle intima commence imm6diatement apr~s l'apolysis (fig. 3 et 4). Sans vouloir faire ici une 6rude pouss6e de ce ph6nom~ne, nous avons not6 quelques phases de la s6cr6tion de la cuticule du nouveau canal; les images observ6es sont conformes ~ celles qu'on connait pour le t6gument. Pendant la s6cr6tion, la surface apicale des cellules du canal pr6sente de courtes villosit6s, au sommet desquelles se trouvent des areas de mat6riel dense. La structure trilamellaire de l'6picuticule externe est bien reconnaissable sur certaines coupes. L'6picuticule interne, d6pos6e ensuite, apparaR d'abord faite d'un materiel homog~ne, finement grenu et moyennement dense; c'est seulement lorsque l'intima du canal a atteint son 6paisseur d6finitive, ou presque, que la couche acquiert une structure h6t6rog~ne, avec des plages claires alternant avec des zones moyennement denses (fig. 5 et 6). Cette transformation est achev6e avant l'ecdysis. Au niveau des canalicules, nous avons pu observer 6galement la formation de l'6picuticule externe, puis de l'6picuticule interne, cette derni~re conservant une structure homog~ne, contrairement ~ celle du canal commun. En outre on note parfois un fin d6p6t h la surface de l'6picuticule externe, mais nous ne pouvons dire s'il s'agit d'une couche de l'6picuticule ou d'un d6p6t superficiel provenant de la condensation du mat6riel pr6sent entre la paroi canaliculaire et le prolongement ciliaire axial.
IlL Modifications du prolongement de type dendritique et formation d'un nouveau manchon terminal Dans la glande en intermue, le prolongement dendritique de la cellule ciliaire 6met son apex un () qui se distingue ~ peine des microvillosit6s qui l'entourent. Nous d6signons ici sous le nom de <>l'6quivalent du segment dendritique externe d'une cellule sensorielle, dont seule une courte zone basale poss~de une structure ciliaire v6ritable (de type 9 x 2 + 0). Lors de l'apolysis, les cils subissent un allongement consid6rable; fls p6n~trent/t l'int6rieur des canalicules (d6barrass6s de leur ancienne intima), les traversent sur toute leur longueur pour se terminer seulement dans le canal axial de la glande. Les sections transversales des canalicules, faites pendant les phases I e t II de la p6riode de mue, montrent distinctement ce prolongement ciliaire (fig. 8 et 9). I1 comporte une douzaine (9 ~ 16) de microtubules simples, d'environ 0.02/~m de diam~tre, dispos6s sans ordre (contrairement anx tubules du segment ciliaire proprement dit). L'ensemble des microtubules est entour6 d'une fine membrane plasmique qui prolonge celle du segment dendritique. L'escape libre entre le cil et la nouvelle intima du canalicule contient souvent un d6p6t granuleux. Les cils se terminent dans l'espace exuvial du canal, au milieu de la s~cr~tion provenant des r~servoirs vid~s; leur diam6tre Fig. 6. Fragment de coupe longitudinale de l'appareil cuticulaire au stade III. On aper~oit, en bas gauche, un canalicule qui d6bouche dans le canal commun (~ droite). Dans l'espace exuvial ( . ) se trouvent plusieurs prolongements ciliaires de diam~tre normal (---~) ou renfl6s ( - ~ ) (x 18.000) Fig. 7. D6tail d'une coupe longitudinale d'un prolongement ciliaire situ6 dans l'espace exuvial; on voit le passage entre un segment de diam~tre normal (----~)et un segment renfl6 (Ar-~). On suit le trajet des microtubules ~t l'int6rieur des deux segments (x 42.000)
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Fig. 8. Section transverse de deux canalicules dans la glande v6siculaire au d~but de la p~riode de mue (phase 1). La nouveUe intima (i) est en cours de d6pSt. L'axe de chaque canalicule est occup6 par un prolongement ciliaire comportant 14 ou 15 microtubules entour6s d'une membrane plasmique. La lumi~re des canalicules renferme ~galement un peu de s~cr~tion, apparaissant sous forme d'un pr6cipit6 finement granuleux. Les deux cellules canaliculaires, repli6es sur ellesm~mes (ms m~so), ont un cytoplasme fiche en microtubules (x 57.000)
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diminue un peu et ils comportent un nombre r~duit de microtubules. On peut donc penser que les microtubules doivent s'arr~ter & des niveaux variables, un peu avant l'extr6mit6 du cfl. I1 est vraisemblable que la rapide croissance du cil s'effectue en m~me temps que le d6collement de l'ancienne intima. En tout cas nous avons constat6 la pr6sence d'un cil ayant atteint sa longueur maximum d~s la premiere phase de ta p6riode de mue. Les cils persistent pendant la 2~me phase, mais ils entrent en d6g6n6rescence pendant la 3~me phase de la p~riode de mue. Sur des sections longitudinales du cil ~ce dernier stade, on peut voir par exemple une succession de segments renfl6s s6par6s par des constrictions (fig. 10). La structure des microtubules peut ~tre conserv6e, ou bien elle s'efface et fournit un mat6riel irr6guli~rement granuleux, les deux types de structures pouvant d'ailleurs s'observer c6te 5 c6te dans une mSme glande. Dans l'espace exuvial du canal, l'extr6mit6 distale des cils pr6sente 6galement des figures de d6g6n6rescence, caract6ris~es surtout par de forts renflements succ6dant fi des zones de diam~tre normal (fig. 6 et 7). A la fin de la 3~me phase on ne trouve plus trace des cils l'int6rieur des canalicules. De profondes transformations peuvent ~tre 6galement observ6es ~ l'apex du segment dendritique proximal d~s la phase I. A c e stade le r6servoir est une cavit6 virtuelle, limit6e d'un c0t6 par la cellule glandulaire et de l'autre par la face externe du repli dendritique apical (fig. 11). Aux abords du r6servoir le cytoplasme de la cellule glandulaire est tr~s riche en v6sicules, dont certaines sont rev6tues et viennent fusionner avec la membrane plasmique. Un processus analogue, quoique moins prononc6, se produit du c6t6 du dendrite. I1 est probable que ce ph6nom~ne assure la croissance du r6servoir (comparer les fig. 11 et 13). A l'extr6mit6 du dendrite se trouve l'appareil centriolaire, mais les axes des deux centrioles font entre eux un angle obtus, alors qu'ils sont dans le prolongement l'un de l'autre pendant l'intermue. Le centriole distal est prolong6 par le cil comportant ~t sa base un segment ciliaire s. str, (fig. 12). Autour de la base du cil, l'extr6mit~ du prolongement dendritique 6met un repli paroi 6paisse (fig. 11 et 12), qui a la forme d'un d6me, perc6 ~ son sommet d'un orifice permettant le passage du cil. Un espace extracellulaire est m6nag6 entre le cil et la face interne du repli, espace un peu 61argi g sa base, autour du segment ciliaire s. str. Au stade repr6sent6 sur la fig. 11 cet espace est en partie occup6 par un mat6riel fibreux, assez dense aux 61ectrons, dispos6 de mani~re plus ou moins r6guli~re en cercles concentriques autour du cil. Ce mat6riel repr6sente l'amorce du manchon terminal qui, aux stades ult6rieurs, prolonge le canalicule. L'examen de la phase I montre donc clairement que le manchon terminal provient d'une sdcrdtion de la cellule ciliaire et non de la cellule du canalicule. La fig. 11 permet ericore de voir que le desmosome cloisonn6 qui r6unit les membranes plasmiques de la cellule glandulaire et de la cellule ciliaire, fait place, au niveau de la base du cil, h une jonction de type zonula adhaerens (fig. 11). Fig. 9. Coupe longitudinale d'un canalicule observ~ au m~me stade que sur la fig. pr6c~dente. On reconnaSt le prolongement ciliaire avec ses microtubules et sa membrane plasmique, l'intima (i) du canalicule et la cellule canaliculaire (cc) (x 25.000) Fig. 10. Coupe longitudinale d'un canalicule h la phase III. Le prolongement ciliaire, en vole de d~g~n6rescence, montre une alternance de segments h diam~tres varies (x 38.000)
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Fig. 11. Coupe longitudinale de l'extr6mit6 du prolongement de type dendritique contenu dans la ceUule glandulaire (cgl) au d~but de la p6riode de mue (phase 1). On volt l'apex du segment proximal (d) et le repli circulaire (rc) qu'il 6met autour de la base du segment dendritique distal. Ce dernier prolonge le centriole distal (cd), seul visible sur cette photographie. On observe 6gale-
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Lors de la 28me phase de la p6riode de mue, le nouveau manchon terminal est entibrement form6; il pr6sente une forme en S sur les sections longitudinales. Comme au stade pr6c6dent, il est enti~rement entour6 d'un repli cytoplasmique prolongeant le segment dendritique de la cellule ciliaire, mais ce repli a beaucoup diminu6 d'6paisseur (fig. 13 et 14). A son apex le repli s'6paissit en un bourrelet circulaire qui enserre l'extr6mit6 du canalicule (fig. 15). Ainsi le manchon vient s'ajuster 6troitement sur le canalicule, auquel il restera attach6 pendant toute l'intermue, puis lors du d6collement de la cuticule h la mue suivante. Mais, bien que solidaires, le manchon terminal et l'intima du canalicule proviennent de la s6cr6tion de cellules diff6rentes. Le manchon vient s'enraciner dans l'apex du prolongement de type dendritique. Dans cette r6gion la membrane plasmique apicale de la cellule ciliaire forme, lors de la 2~me phase, de nombreuses microvillosit6s, tass6es les unes contre les autres et diversement orient6es (fig. 15 et 16). La formation d'un repli cytoplasmique et d'un bouquet de microvillosit6s n'entraLqe, semble-t-il, aucune transformation au niveau de l'appareil centriolaire de la ceUule ciliaire; seule la position relative des deux centrioles se modifie 16g~rement. Lors de la 3brae phase de la p6riode de mue, le repli cytoplasmique entourant le nouveau manchon terminal finit par dispara~tre; en m~me temps le cil d6g6n~re dans le canalicule. Ensuite le manchon se d6tache de l'apex du prolongement dendritique et les microvillosit6s s'6panouissent dans le r6servoir d6j~ gonfl6; elles entourent alors le cil r6duit h sa partie proximale. On retrouve ainsi, avant m~me l'ecdysis, la disposition caract6ristique du stade d'intermue. En rdsumd, les transformations qui affectent la glande v6siculaire des Machilidae au cours d'un cycle de mue peuvent se traduire par le sch6ma suivant (fig. 18). Les trois premieres 6tapes concernent la p6riode de mue, la quatri~me correspond ~ la phase d'intermue. Phase I (fig. 18 AJ. Probablement de courte dur6e, la phase I se place imm6diatement aprbs le d6collement de l'ancienne cuticule (apolysis). Les anciennes formations cuticulaires (exuvies du canal commun et des canalicules avec leurs manchons terminaux) se retrouvent dans l'espace exuvial, h l'int6rieur du canal commun de la glande. Les r6servoirs des cellules glandulaires se sont entibrement vid6s, la s6cr6tion qu'ils renfermaient s'est 6cout6e dans l'espace exuvial. Le prolongement dendritique de la ceUule ciliaire a 6mis une sorte de long (~cfl>>(segment distal) qui parcourt le canalicule correspondant et ne se termine que dans le canal commun. Autour de la base du segment ciliaire, un repli de l'apex du dendrite (segment proximal) commence h d6poser le mat6riel qui formera le nouveau manchon terminal. Pendant cette phase et la suivante, le cytoplasme des cellules glandulaires subit un important remaniement: certaines zones subissent une autolyse, tandis que d'autres montrent une forte activit6 s~cr6trice. ment la substance qui commence ~tformer le manehon terminal (mt). Le contact entre le prolongement dendritique et la cellule glandulaire est assur6 par un desmosome cloisonn6 (dm), puis par une zonula adhaerens (z); l'espace intercellulaire s'ouvre au niveau de l'6bauche du r6servoir (r) (x 35.000) Fig. 12. D6tail de la r6gion de jonction entre segment proximal et segment distal du prolongement de type dendritique. On volt au centre le centriole distal (cd) surmont6 d'un tr~s court segment ciliaire s. str. (sc), puis du prolongement distal reconnaissable h ses microtubules coup6s en long (x 68.000)
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Fig. 13. Coupe Atravers une ceUule glandulaire (egl) et l'extr6mit6 d'un prolongement de type dendritique (d) darts une glande h la phase II. Au centre le segment dendritique proximal, coup6 obliquement, comporte deux centrioles superpos6s (cp et cd) entre lesquels on voit quelques racines ciliai~es. Les membranes plasmiques accol6es de la eelh~le glandulaire et de la cellule ciliaire
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Phase H (fig. 18 B). Alors que les anciennes formations cuticulaires se trouvent toujours dans le canal de la glande, la nouvelle intima est en cours de d6p6t. Le manchon terminal acquiert sa taille d6finitive; il est encore entour6 d'un repli cytoplasmique venant de l'apex du prolongement dendritique proximal, mais ce repli devient de plus en plus mince. Le manchon terminal est donc form6 par une s6cr6tion de la cellule ciliaire et non de la cellule du canalicule. Le segment distal du prolongement dendritique traverse sur toute leur longueur le manchon et le canalicule. Un bouquet de microvillosit6s se constitue g l'apex du segment dendritique proximal, autour de la base du cil.
Phase IIl(fig. 18 CJ. A c e stade plus avanc6 de la p6riode de mue, la nouvelle intima est presque entibrement d6pos6e. Le prolongement ciliaire d6g6n~re (il n'en subsiste plus qu'un court fragment proximal) et le repli cytoplasmique entourant le manchon terminal finit par dispara~tre. Le r6servoir s'est fortement gonfl6. L'exuviation (ecdysis), qui marque la fin de cette 3~me phase, n'entra~ne que peu de modifications dans la glande.
Phase IV(fig. 18 D). Elle dure pendant toute la p6riode d'intermue. Les r6servoirs des cellules glandulaires ont acquis une tr~s grande taille. Le manchon terminal, 6troitement ajust6 h l'extr6mit6 du canalicule, s'est s6par6 du prolongement dendritique de la cellule ciliaire; la lumi~re du manchon et celle du canalicule apparaissent vides, ou ne renferment que des traces de s6cr6tion.
D. Discussion
De m~me que divers autres tissus d'origine ectodermique (t6gument, sensilles, glandes diverses) ou non ectodermiques (comme l'6pith61ium de l'intestin moyen), les glandes v6siculaires des Machilides subissent, pendant la p6riode de mue, des transformations cytologiques comportant, non seulement un renouvellement de la cuticule du canal et des canalicules, mais aussi d'importants remaniements h l'int6rieur des cellules glandulakes et des cellules ciliaires. Les transformations d6butent au moment de l'apolysis; par contre elles s'ach~vent avant la fin de la p6riode de mue, le ph6nom~ne de l'exuviation (ecdysis) ne marquant pas de changements notables dans la structure de la glande.
1. Remaniements d l'intdrieur des cellules glandulaires La forte diminution de volume des cellules glandulaires imm6diatement aprSs de d6collement de l'intima des canalicules tient, non seulement h ce que les r6servoirs se vident de leur contenu, mais aussi h ce qu'une partie du cytoplasme subit une autolyse sont unies par des desmosomes cloisonn6s et 6mettent des digitations; un m6so (ms) sinueux se rattache ~ la membrane plasmique externe de la cellule glandulaire. Plus haut on volt la coupe transversale du segment dendritique distal avec ses microtubules, entour6 du manchon terminal, puis d'une lame cytoplasmique eorrespondant au repli circulaire (volt d6tail sur la figure suivante). La discontinuit6 apparente entre le segment proximal et le segment distal du prolongement dendritique est due seulement au plan de la coupe. Le r6servoir (r) est encore tr~s petit h ce stade et il contient un peu de s6cr6tion, c centriole de la cellule glandulaire (x 19.000) Fig. 14. D6tail d'une pattie de la coupe pr6c6dente. Au centre, le segment distal du pzolongement de type dendritique avec ses microtubules et sa membrane plasmique; puis le manchon terminal (mt) dont la substance pr6sente une forte densification autour du prolongement ciliaire; enfin le repli cytoplasmique (rc) en eontinuit6 avec le segment dendritique proximal (x 40.000)
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Fig. 15. Coupe longitudinale de la zone de jonction entre le prolongement de type dendritique (d) et l'extr6mit~ du canalicule (i intima). L'ensemble se place darts une ceUule glandulaire (cgl) et falt saillie dans son r~servoir (r) d6j~ dilat~ ~ ce moment (fin de la phase II). A l'apex du segment dendritique proximal on volt les microviUosit6s n~o-form6es (v) et le repli circulaire (rc) termin~ par un bourrelet qui enserre l'extr6mit~ du canalicule. A l'int6rieur du repli s'est d~pos~e la substance for-
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plus ou moins prononc~e, li6e ~ la formation et ~ l'6volution de corps de type lysosomes et souvent aussi g une intense vacuolisation. Des ph~nombnes de cytolyse comparables ont 6t6 d6crits darts divers tissus d'Insectes lots de la m6tamorphose. Par exemple l'involution des glandes s~ricigbnes du Vet fi soie ~ la fin de la vie larvaire et au d6but de la vie nymphale implique la formation d'autophagosomes et leur transformation en autolysosomes, ainsi qu'une vacuolisation tardive du cytoplasme (Matsuura et al., 1968). De m~me lors de la mue imaginale de Blatta orientalis l'~pitMlium glandulaire des tergites abdominaux subit une forte d6g6n6rescence marquee par l'apparition de nombreuses vacuoles autophagiques et de figures my~liniques (Plattner et al., 1972); mais, chez la femelle de cette esp~ce, un nouvel 6pith61ium glandulaire se constitue, qui sera fonctionnel chez l'adulte. Dans le cas des glandes v~siculaires des Machilides, on n'observe g~n6ralement pas une histolyse complete de la glande g chaque mue; le plus fr6quemment seules certaines cellules ou certaines parties du cytoplasme ~ l'int6rieur d'une m6me cellule pr6sentent l'autolyse, ce remaniement ~tant peut-~tre li6 aux intenses syntheses prot~iques qui se d6roulent dans les cellules voisines, ou dans des parties diff6rentes du cytoplasme, riches en reticulum granulaire et en petites mitochondries. Aux processus d'autolyse s'ajoutent, dans les glandes v6siculaires, des pMnombnes de phagocytose dus g la presence d'h~mocytes ~ l'int~rieur des glandes. Le fait peut paraRre surprenant, car chaque glande est entour6e d'une lame basale apparemment continue et l'on comprend mal comment des h6mocytes parviennent g franchir cette barribre. Cependant on peut rapprocher ce fair d'une observation que nous avons faite fr6quemment chez les Machilides, concernant la pr6sence d'Mmocytes 5 granules dans le liquide exuvial, entre l'ancienne et la nouvelle cuticule t~gumentaire; on ignore comment ces cellules sanguines ont pu traverser l'6piderme et sa basale. Une observation identique, au niveau du t6gument, peut 6tre faite chez les Collemboles (Barra, 1969). Quoiqu'il en soit, les Mmocytes pr6sents dans la glande v~siculaire doivent phagocyter les testes de certaines cellules glandulaires (et peut-~tre aussi canaliculaires?) ayant subi une autolyse avanc6e. De tels ensembles cellulaires sont rejet6s en m~me temps que l'exuvie des anciens canalicules, nous en avons observ6 dans l'espace exuvial l'int~rieur du canal central de la glande (el. fig. 4). La d6g6n6rescence et le rejet de quelques cellules glandulaires au moment de chaque mue implique probablement leur renouvellement 5 partir de cellules-souches rest~es en r~serve. I1 existe,/t la p6ripMrie de la glande v6siculaire, quelques cellules qui pourraient correspondre ~ ces cellules-souches, du fait de leur rapport nucl6oplasmique 61ev6 et de leur cytoplasme du m~me type que celui des cellules glandulaires
mant le manchon terminal (mt), travers6 par un canal axial, dont on n'apergoit qu'un court fragment sous forme d'une aire m6diane claire (x 31.000) Fig. 16. Au m~me stade que ci-dessus, coupe de l'extr6mit6 du segment dendritique proximal montrant les deux centrioles superposes, les racines ciliaires, et, au-dessus du centriole distal, le court segment ciliaire s. str., au milieu d'une cavit6 qui communique avec le r6servoir (cf fig. 12). Encore au-dessus un groupe de microvillosit6s n6o-form6es (v) (x 42.000) Fig. 17. Coupe longitudinale du manchon terminal, au d6but de la phase III. Dans le conduit axial se place un prolongement ciliaire (= segment dendritique distal) en vole de d6g6n6rescence. Ace stade le repli circulaire (rc) entourant le manchon s'est consid6rablement aminci, r r6servoir de la cellule glandulaire (x 46.000)
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A
----mr
-
C
D
-cgl
--d
Fig. 18 A - D . Schema des modifications subies par une des unit6s fonctionelles de la glande v~siculaire pendant la p6riode de mue. Pour plus de clart6, les dessins ont 6t6 limit6s ~ la r6gion de jonction entre le prolongement de type dendritique (d) et l'appareil canaliculaire (i intima), ces 616ments ~tant supposes rectilignes. Les quatre cellules emboit6es qui constituent l'unit6 fonctionnelle sont repr6sent~es de facon conventionnelle: cellule ciliaire (pointill~ l~che), cellule glandulaire (pointill6 dense), eellule du canalicule c c (petits cercles blancs), cellule enveloppe c e (cercles noirs). (A) - (C) repr6sentent respectivement les phases I, II et III de la p6riode de mue; (D) re-
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normales. Nous n'avons jamais observ6 de mitoses darts ces cellules, ce qui n'est pas surprenant quand on sait que les divisions cellulaires peuvent avoir lieu longtemps avant la mue. I1. Ecoulement et roles possibles de la sdcrdtion
I1 est probable qu'une partie de la s6cr6tion qui gonfle les r6servoirs cellulaires est susceptible de g'6couler ~ l'ext6rieur pendant l'intermue, en filtrant d'abord h travers les manchons terminaux, puis en passant par les canalicules et le canal commun. Cependant nous n'avons jamais observ6 de r6servoirs rides pendant l'intermue. Mais il faudrait examiner de plus pros ce qui se passe lorsque l'insecte d6vagine ses v6sicules coxales pour absorber de l'eau sur une surface humide. I1 y a peut-~tre g ce moment 6mission d'une faible quantit6 de s6cr6tion, qui viendrait recouvrir la surface des v6sicules saillantes; on peut imaginer que cette s6cr6tion agirait par exemple ~ la mani~re d'un agent mouiUant, facilitant le contact intime entre la goutte d'eau et la cuticule particuli~re (permeable) qui recouvre une grande partie de chaque v6sicule. Quoiqu'il en soit, c'est imm6diatement apr~s le d6collement de l'ancienne cuticule (et de l'intima du canal et des canalicules) qu'a lieu la vidange rapide et complete de tousles r~servoirs des cellules glandulaires. La s6cr~tion se r6pand dans le canal axial de la glande, o~ elle est facile h observer sur les coupes semi-fines color6es au bleu de toluidine par sa coloration m6tachromatique rose. Un examen plus precis montre que la s6cr6tion s'accumule dans l'espace exuvial (fig. 3). Ce n'est que vers la fin de la p6riode de mue, lorsque l'insecte subit l'exuviation, que la s6cr6tion est rejet6e h l'ext6rieur. Weyda (1974 et article ~ paraRre) pense que la s6cr~tion a essentiellement pour r61e de coller au substrat les v6sicules coxales d6vagin~es et de permettre ainsi ~ Finsecte frais de sortir de son exuvie. Cependant on s'explique mal comment la s6cr6tion, accumul6e dans l'espace exuvial du canal, parvient ~ traverser l'ancienne cuticule pour se d6verser ~t la surface des v6sicules d6vagin6es. III. Formation de l'intima canalieulaire et du manehon terminal
Sit6t apr~s le d6collement de l'ancienne cuticule, l'ensemble des exuvies canaliculaires se retrouvent dans le canal central de la glande, avec l'exuvie du canal lui-m~me; le rejet de ces anciennes formations cuticulaires ~ l'ext6rieur du corps ne se fera qu'au moment de l'exuviation. Des faits comparables ont 6t6 signal6s par exemple dans la glande mandibulaire d'un Termite au cours de la mue (Lambinet, 1959); dans ce cas 6galement les manchons terminaux (~terminaisons des canalicules>> selon Lambinet qui les a observdes seulement en microscopie optique) restent solidaires des canalicules; ils sont rejetds darts le canal central de la glande imm6diatement apr~s l'apolysis. La s6cr6tion de la nouvelle intima du canalicule ne pr6sente apparemment pas de diff6rences importantes avec celle d6crite par les auteurs pour la cuticule t~gumentaire d'insectes varies (voir par exemple Delachambre, 1970; Weis-F ogh, 1970). Chaque canalicule est 61abor6 par une unique cellule tr~s allong6e, riche en microtubules, ellepr6sente la phase IV qui correspond ~ l'intermue (voir explications darts le texte), egl cellule glandulaire; ms m6so; rnt manchon terminal; pc prolongement de la eellule eiliaire (= segment externe du prolongement de type dendritique); ped prolongement eiliaire en d6g~n6rence; r r~servoir de la ceUule glandulaire
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m6me entour6e d'une cellule enveloppe. Seule l'extr6mit6 ant~rieure du canalicule semble toujours entour6e de la cellule glandulaire, comme si cette derni~re ~tait capable d'~laborer de la cuticule. On remarque surtout qu'au moment o~ se mettent en place les couches de cuticule, la lumi~re de chaque canalicule est occup6e par un ~cil>>, ou plus exactement par le segment externe du prolongement distal d'une cellule ciliaire. Ces ((cils>>d6g6n~rent avant la fin de la p~riode de mue, lorsque l'intima canaliculaire paraTt compl~tement form6e. C'est ~galement autour de formations ciliaires temporaires qu'est d6pos~e la cuticule des canaux des glandes coll6t6riques d'au moins deux esp~ces de L6pidopt~res: Galleria mellonella (Barbier, 1974) et Hyalophora cecropia (Berry et Johnson, 1975). Mais dans le cas de la glande v6siculaire des Machilides, le (~cil>>provient d'une cellule particuli~re; ce n'est pas une diff6renciation d'une cellule glandulaire, comme dans les glandes coll6t6riques. La formation d'un nouveau manchon terminal (~end apparatus>> des auteurs anglosaxons) a pu ~tre suivie en d6tail sur soupes ultrafines; elle apporte des faits qui, g notre connaissance, n'avaient jamais encore 6t6 d~crits. Le manchon terminal r~sulte de la s6cr~tion extracellulaire d'une substance qui prend, d~s le d6but de son d6p6t, l'aspect d'un r6seau dont les mailles irr6guli~res sont dispos6es de fa~on g peu pros concentrique autour du segment ciliaire. La s6cr6tion se fait sur la face interne d'un repli circulaire plac6 ~ l'apex du segment proximal du prolongement dendritique. C'est donc la cellule ciliaire qui fabrique le manchon et non la cellule du canalicule; mais g l'une de ses extr6mit6s, le manchon vient s'ajuster 6troitement autour de l'extr6mit6 du canalicule et les deux 61~ments sont d6sormais solidaires. La nature chimique de la substance constituant le manchon terminal n'est pas connue. Apr~s le d6pft du manchon, le repli de la cellule ciliaire dispara~t, en m~me temps que d6g~n~re le ~(cil>>dans le canalicule.
111. Formation d'un prolongement ciliaire temporaire Le caract~re le plus remarquable de la glande v~siculaire des Machilides tient ~t ce que chaque r6servoir de cellule glandulaire re~oit un prolongement de type dendritique 6mis par une cellule particuli~re, la cellule ciliaire (~t vrai dire nous sommes encore real renseign6s sur cette cellule, dont nous n'avons r~ussi g identifier le corps cellulaire et son 6ventuel prolongement axonique; voir notre article actuellement sous presse). L'analogie entre le prolongement dendritique de la cellule ciliaire et un v6ritable dendrite de cellule sensorielle bipolaire est encore renforc~e par les transformations parall~les que subissent ces 616ments lors de la mue. D~s le d6collement de l'ancienne cuticule, le segment distal du prolongement dendritique s'accrott fortement en longueur, formant une sorte de (~cil>>(mais la structure ciliaire typique n'occupe qu'un court segment g sa base) qui, nous l'avons rappel6 plus haut, parcourt tout le canalicule correspondant. A la fin de la p~riode de mue, ce ((cil>>d6g6n~re presque enti~rement, mais il subsiste un court segment qui persiste jusqu'~ la mue suivante. Des fairs comparables ont 6t6 observ6s chez d'autres Insectes pour divers sensilles de structures et de fonctions vari6es. Darts un premier groupe de sensilles (il s'agit surtout de m6canor~cepteurs) le d6collement de l'ancienne cuticule s'accompagne de la croissance du segment dendritique externe, ce qui a pour r6sultat de maintenir une liaison anatomique entre la cellule sensorielle et l'ancien t6gument jusqu'au moment de l'ecdysis. Ce mode de mue, qui n'entra~ne qu'une courte interruption dans le fonc-
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tionnement du sensille, existe notamment pour les soles cercales de Gryllus (Schmidt et Gnatzy, 1971; Gnatzy et Schmidt, 1972 a, b), pour les sensilles du 3~me article de l'antenne du Collembole Onychiurus (Altner et Thies, 1972) etc. Pour d'autres sensilles il y a d6g6n6rescence des prolongements dendritiques externes avant l'exuviation. Ainsi pour les chimior6cepteurs du palpe maxillaire de Locusta Blaney et al. (1971) notent une d6g6n6rescence des processus distaux des dendrites un jour environ avant l'ecdysis, puis la croissance de nouveaux processus distaux par les bases ciliaires rest~es en place. Dans le cas des chimior~cepteurs de l'antenne de Necrophorus la partie distale du dendrite (et sa gatne) d6g6n~rent au moment off s'est d6pos6e la premiere couche de cuticule de la nouvelle soie, quelques jours avant la mue imaginale (Ernst, 1972); c'est ~t partir de la r6gion ciliaire, rest6e en place, que s'accro~t, puis se ramifie, le prolongement distal du dendrite. Une transformation de ce type semble 6galement caract6riser l'organe postantennaire d'Onychiurus (Altner et Thies, 1972). La cellule ciliaire de la glande v6siculaire des Machilides pr6sente ce second type de mue. Nous pensons que, d~s le d6but de la p6riode de mue, la croissance d'un nouveau prologement distal se produit ~ partir du segment ciliaire (s. str.) et de l'appareil centriolaire rest6s en place pendant toute l'intermue. En particulier le centriole distal persiste ~ la fin de la p6riode de mue, contrairement aux cas d6crits par Moulins (1967) pour les sensilles hypopharyngiens de Blabera, puis par Blaney et al. (1971) pour les r6cepteurs du palpe maxillaire de Locusta. On peut remarquer qu'au d6but de la p6riode de mue le prolongement distal de la cellule ciliaire des Machilides s'6tend dans l'espace exuvial m6nag6 entre l'ancienne intima du canal et la nouvelle. I1 n'est pas entour6 d'une gaSae cuticulaire, dont la pr6sence est au contraire g6n6rale autour des segments dendritiques distaux des sensilles (Blaney et al., 1969; Schmidt et Gnatzy, 1971; etc.). Les auteurs supposent que cette ga~ne assure la protection du dendrite, en le s6parant du liquide exuvial charg6 d'enzymes (Schmidt et Gnatzy, 1971; Ernst, 1972; Altner et Thies, 1972). Mais dans la glande v6siculaire des Machilides, le prolongement ciliaire est libre dans l'espace exuvial; on doit doric admettre qu'au d6but de la p~riode de mue cet espace, rempli de la s6cr6tion venant des r6servoirs, ne renferme pas encore d'enzymes. C'est seulement vers la fin de la p~riode de mue que les enzymes seralent s6cr~t6es, ou que leur concentration deviendrait suffisante pour entra~ner une d6g6n6rescence des segments dendritiques distaux.
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