Douleur analg. (2011) 24:9-17 DOI 10.1007/s11724-011-0230-3
ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE
DOSSIER
Éducation du patient et douleur chronique : une approche sociopsychoéducative comme complément des stratégies multidisciplinaires de soins Patient education and chronic pain: a social, psychological and educational approach as a complement to multidisciplinary strategies of care A. Deccache · D. Doumont · J. Berrewaerts · C. Deccache Reçu le 16 novembre 2010 ; accepté le 17 décembre 2010 © Springer-Verlag France 2011
Résumé Introduction : À partir d’une revue de littérature relative aux stratégies de prise en charge multidisciplinaire de la douleur chronique, cet article examine les aspects éducatifs des interventions destinées aux patients. Méthode : Revue de littérature (1993–2010) de programmes de gestion de la douleur chronique et analyse détaillée des composantes éducatives de 31 programmes éducatifs. Résultats : La majorité des auteurs recommandent d’intégrer un volet éducatif d’apprentissage dans les programmes, et la majorité des programmes décrits incluent de tels volets. Toutefois, il y a une réelle diversité dans la conception de l’éducation du patient et dans ses applications pratiques. Plusieurs programmes se fondent sur des visions monodisciplinaires, contrairement à l’approche multidisciplinaire inhérente à l’éducation du patient. Cela conduit à des malentendus, des limites, des zones d’ombre où tout le potentiel de l’éducation des patients n’est pas exploité. Conclusion : Peu de programmes utilisent toutes les richesses d’une approche combinée, à la fois psychologique, socioanthropologique et pédagogique, qui constitue l’éducation du patient. Des recommandations d’objectifs éducatifs, de contenus et de méthodes sont proposées. Pour citer cette revue : Douleur analg. 24 (2011). Mots clés Douleur chronique · Programmes multidisciplinaires · Gestion de la douleur · Éducation du patient · Modèles théoriques Abstract Introduction: Starting from a literature review of strategies for multidisciplinary care in chronic pain manage-
A. Deccache (*) · D. Doumont · J. Berrewaerts · C. Deccache UCL-RESO, Patient and Health Education, Health and Society Institute IRSS, université catholique de Louvain, Belgique e-mail :
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ment programmes, the present paper studies the educational aspects of interventions designed for patients. Method: Literature review of chronic pain management programmes (1993–2010), and detailed analysis of the components of 31 patient education programmes. Results: A number of authors recommend that educational and learning interventions should be included in chronic pain management programmes, and many programmes do include such interventions. Yet, there is a real diversity of theoretical views of education and in their practical implementation. Several programmes are founded on a monodisciplinary view of education, which is in opposition to the multidisciplinary foundations of patient education. This leads to misunderstandings, limitations and “twilight zones” and to a misuse of the potentialities of patient education. Conclusion: Few programmes use all the variety of combined approaches, from psychology, socioanthropology and pedagogy, that make patient education. Recommendations are made about objectives, contents and methods of such programmes. To cite this journal: Douleur analg. 24 (2011). Keywords Chronic pain · Multidisciplinary programmes · Pain management · Patient education · Theoretical models
Introduction La douleur chronique est, dans les pays industrialisés, la cause la plus répandue de handicap à long terme. Près de 30 % des gens font l’expérience, à un moment donné de leur vie, d’une douleur chronique sévère [Brookoff, 2001 cité in 16]. Cependant, plusieurs études, rapports et déclarations suggèrent que toute une série de douleurs, dont les douleurs chroniques non cancéreuses, restent sousdiagnostiquées et sous-traitées [16].
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Même si la « douleur » reste une des plaintes le plus souvent rencontrées en pratique médicale, on rencontre encore une connaissance professionnelle insuffisante de ses manifestations et de sa prise en charge. Dans de nombreux cas, on a pris en charge de manière inadéquate et inefficace les patients douloureux chroniques. Certains médecins acceptent leurs plaintes d’emblée, surprescrivent des médicaments et réalisent des examens répétitifs dans l’espoir vain de trouver un simple problème anatomique à la base de la douleur. Les comorbidités sont souvent ignorées. La situation opposée se présente également, et certains médecins croient que toutes les plaintes de douleur sont d’origine psychologique et donc les rejettent. On rencontre encore des patients avec des problèmes manifestes, diagnosticables, provoquant des douleurs répétées, pour lesquels des thérapies potentiellement efficaces existent, et qui ont été catalogués comme « patients psychosomatiques » [19]. Aux Pays-Bas, 20 % des plaintes auxquelles le médecin de famille est confronté se rapportent à des problèmes de douleurs chroniques, notamment dorsales. En Belgique, la situation est similaire : 35 % des patients interrogés dans une étude [5] ont une expérience négative quant à la capacité de leur médecin traitant à prendre en charge leur problème douloureux de façon satisfaisante, que ce soit à travers une impression de non-prise au sérieux ou un manque de temps consacré, ou encore à travers une attitude empreinte de fatalisme ou de manque de créativité, voire une impression d’incompétence. Roth et al. [26] mettent en évidence que certains types de patients sont plus insatisfaits que d’autres. Bien que variable en fonction du type de douleur, l’insatisfaction des patients concerne principalement la dimension « cognitive » de la prise en charge, c’est-à-dire les informations fournies durant les rencontres médecin–patient (par exemple, « le médecin m’a dit tout ce que je voulais savoir sur ma maladie. Le médecin m’a dit le nom de ma maladie en des mots que je pouvais comprendre »). Ils expriment davantage d’insatisfaction que sur les efforts du médecin pour traiter leur douleur. Ces résultats mettent l’accent sur l’importance de l’éducation du patient comme composante des interventions de douleur chronique. Les douleurs chroniques, et particulièrement les cas résistants, nécessitent une approche multidisciplinaire qui aborde l’interaction complexe des facteurs physiques, psychologiques et sociaux qui contribuent à la douleur ou interagissent avec elle. La création de « centres de la douleur » a été une des réponses permettant une collaboration étroite entre spécialistes, personnel infirmier, psychologues et autres intervenants, avec le patient comme point central. Selon le Livre blanc de la Belgian Pain Society [4], toute douleur que le médecin généraliste (de première ligne) ou le médecin spécialiste (de deuxième ligne) n’est pas en mesure de maîtriser, et qui est par conséquent adressée au
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centre algologique, doit pouvoir être traitée par une équipe spécialisée et multidisciplinaire. Multi- ou interdisciplinarité et éducation du patient forment une association indispensable en raison même de la multifactorialité des comportements des patients auxquels l’éducation tente d’apporter une aide. Il ressort de plusieurs publications que l’éducation du patient est aujourd’hui considérée comme un élément d’importance dans les stratégies thérapeutiques dans la prise en charge de la douleur chronique. Mais en même temps, il semble qu’elle soit comprise et mise en œuvre de manières diverses, voire contradictoires, et parfois inadéquates. Qu’est-ce que l’éducation du patient dans les situations de chronicité ? Quelle place peut-elle occuper dans la prise en charge de la douleur ? Comment améliorer les programmes thérapeutiques existants ? C’est à ces questions que cet article tente de répondre, à travers une analyse de la littérature scientifique des 16 dernières années, et des programmes éducatifs décrits dans les traitements de la douleur chronique. S’ensuit une confrontation critique avec les expériences et enseignements issus de l’éducation du patient chronique des 30 dernières années, et de la manière dont l’algologie les implante et les applique.
Méthodologie Cet article est fondé sur une double revue de littérature, réalisée en collaboration avec l’Institut belge de la douleur–UPSA, le centre de lutte contre la douleur des cliniques UCL Saint-Luc (Pr L. Plaghki) et la société scientifique de médecine générale (Dr M. Vanhalewyn) [5]. Cette base a été complétée d’un examen des publications pertinentes sur la période 2004–2010. Les articles retenus pour cette revue de littérature ont été sélectionnés avec les mots clés patient education, chronic pain, et management program, à partir des bases de données Medline, Current Contents, Francis, Doctes et Eric. Au total, 178 références pertinentes ont été obtenues. Quarante-sept articles ont été retenus pour leur pertinence, intérêt et accessibilité. Dans cet ensemble, seuls 31 articles décrivent concrètement des programmes de gestion de la douleur chronique en y incluant des aspects d’éducation du patient, et ont été analysés en détail. Objectifs, contenus, méthodes, intervenants et moyens mis en œuvre sont rassemblés et décrits.
Prise en charge multidisciplinaire de la douleur chronique : une place imprécise pour les « stratégies » éducatives En 1979, l’International Association for the Study of Pain (IASP) a introduit la définition la plus utilisée de la douleur :
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« une expérience désagréable à la fois sensorielle et émotionnelle, résultant d’une lésion tissulaire — réelle ou potentielle — ou décrite en référence à une telle lésion ». La douleur chronique est très souvent associée avec un handicap physique, émotionnel et social. Une interaction complexe entre ces facteurs contribue au maintien de la douleur. De ce fait, le traitement devrait aborder les aspects et/ou conséquences sociaux et psychologiques de la douleur autant que ceux relatifs à une pathologie physique éventuelle. Depuis plus de 20 ans, l’utilisation d’approches thérapeutiques multidisciplinaires de la douleur chronique est recommandée [11,30]. Sur le plan de la prise en charge, il ressort que l’approche médicale traditionnelle (analgésie pharmacologique, neurochirurgie fonctionnelle, etc.) de la douleur chronique doit, sauf exception, céder la place en faveur d’interventions de nature psychologique (par exemple, thérapie cognitivocomportementale, TCC ou CBT) et sociale. Le maintien de l’approche médicale traditionnelle, conçue et efficace pour traiter la douleur aiguë, peut devenir contre-productive, voire carrément néfaste dans le contexte de la douleur chronique [23]. Le label « biocomportemental » a été attribué à ces modalités de traitement. Il fait référence à des méthodes prouvées et sûres, qui mettent l’accent sur l’autogestion et l’acquisition d’un autocontrôle, pas seulement sur les symptômes de douleur mais aussi sur les attributions cognitives ou les significations données aux symptômes. Ces méthodes ont pour objectif de maintenir un niveau satisfaisant de fonctionnement psychosocial, même si la douleur n’est pas totalement absente. De nombreuses modalités de traitement se retrouvent sous le vocable de traitement biocomportemental, les plus étudiées étant le biofeedback, la gestion du stress, la modification comportementale, la TCC, la relaxation, l’hypnose et l’éducation [10]. Pour Katz [17] et Allaz [2], très peu de patients ont besoin d’une psychothérapie, et les douleurs chroniques médicalement inexpliquées ne représentent pas en soi une indication à une psychothérapie. L’éducation du patient (ou éducation thérapeutique du patient) est ainsi mentionnée très tôt comme une composante des approches thérapeutiques multidisciplinaires. Elle l’est comme une composante spécifique, alors que l’examen des autres stratégies thérapeutiques, comme le présentent les paragraphes suivants, montre que des aspects éducatifs existent dans quasi toutes les approches. Interventions psychologiques Pour Katz [17], une gestion correcte de la douleur chronique passe par la prise en compte des problèmes psychologiques des patients. La dépression est fréquente (30 à 50 % des cas) dans toutes les pathologies douloureuses persistantes non
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cancéreuses examinées dans les centres de traitement de la douleur [6]. Le traitement psychologique aborde les symptômes de dépression et d’anxiété, et enseigne la gestion du stress. On y aide les patients à apprendre des techniques cognitives et comportementales pour améliorer leur perception et leurs réactions face à leurs sensations et plaintes de douleur [22]. Pour certains même [17], un aspect essentiel de la gestion de la douleur est d’arriver à « empouvoirer » les patients, c’està-dire les aider à apprendre qu’ils peuvent aller mieux et que leurs actions peuvent avoir un effet sur cette amélioration. Or, l’empowerment est un des processus clés de l’éducation thérapeutique, conçue comme une aide à apprendre sa santé, se l’approprier et maîtriser ce qui l’influence. TCC Les TCC sont centrées sur la modification des comportements (thérapies comportementales) ou la restructuration des pensées dites « dysfonctionnelles » (thérapies cognitives), ou encore les deux. Dans le modèle comportemental, le conditionnement opérant est utilisé pour accomplir deux buts principaux : diminuer la fréquence des « comportements de douleur » et augmenter la fréquence des « bons comportements ». L’objectif principal des programmes comportementaux est le reconditionnement du patient douloureux. Ici aussi le conditionnement est une forme, souvent décriée, car parfois manipulatrice (agissant sur le patient), d’éducation puisqu’elle vise à apprendre au patient à agir autrement. Entre le conditionnement et l’empowerment, on se retrouve aux deux extrêmes du processus éducatif, l’un percevant l’éducation comme « une action d’apprentissage sur un patient » et l’autre comme « une action avec ». Le modèle cognitivocomportemental de la douleur chronique est également centré sur la façon dont les sentiments, les attitudes et les croyances irrationnelles ou non influencent la perception de la douleur. Ce modèle met l’accent sur l’identification (par les soignants et les patients) des systèmes de croyance irrationnels qui exacerbent ou maintiennent la douleur, en visant à les remplacer par des attitudes et croyances plus adaptatives. Ces techniques comprennent la correction, la restructuration cognitive, la résolution de problèmes, la refocalisation de l’attention, l’acquisition de capacités interpersonnelles et la gestion du stress [24]. Elles font ainsi aussi référence à l’éducation mais intègrent la dimension psychosociale à l’approche de la douleur. Les systèmes de croyances, les attitudes, sont par définition à la croisée du psychique et du social, et s’élaborent, tout comme les représentations sociales sur lesquelles nous reviendrons, par le traitement cognitif, le « filtrage personnel » d’acquis sociaux (produits de l’éducation familiale et culturelle). Ce faisant, on introduit le rôle et l’influence de
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l’appartenance sociale, de la pression sociale (à se comporter de telle ou telle façon, en ce compris le ressenti et l’expression de la douleur), du soutien social (familial, social, et soignant) dans l’apprentissage de la réaction à et de la gestion de la douleur, y compris la recherche d’aide et de soins. Restructuration cognitive La composante cognitive précise la façon dont le patient se représente la cause de sa douleur et son attitude vis-à-vis de la douleur. Dans la restructuration cognitive, on examine les effets du « style personnel d’ajustement », le coping, du sentiment d’efficacité personnelle (perception d’une capacité personnelle à réussir ses propres actions), du lieu de contrôle (la perception que la santé et la maladie sont en partie du moins en son propre pouvoir), des croyances et des émotions sur le vécu et la prise en charge de la douleur, et on les intègre dans les interventions thérapeutiques comme « objets de soins et d’attention » [20]. L’approche cognitive souligne les effets du traitement personnel d’information sur l’expérience douloureuse. Elle conceptualise la douleur comme un événement perceptif, qui est le résultat de l’intégration et de l’interprétation à la fois de stimuli sensoriels et psychologiques. La thérapie cognitive donne un cadre aux patients pour leur permettre d’acquérir des capacités critiques afin de gérer plus efficacement le stress et d’être capables de gérer et de défier les pensées négatives irrationnelles. Par cette prise de conscience, le patient est capable de défier et de changer sa perception, de diminuer son stress et sa réactivité, d’augmenter ses capacités d’autogestion et d’amoindrir les conséquences négatives et dangereuses du stress. Le processus de restructuration cognitive influence positivement la santé, la prévention de la maladie et la gestion de la maladie [31]. Pour Wells-Federman et al. [31], les résultats d’une thérapie cognitive optimale permettent au patient, entre autres, de prendre conscience de la relation qui existe entre cognitions, émotions, comportements et physiologie, d’identifier les signaux d’alarme physiques, émotionnels, et comportementaux du stress, de changer la façon dont il pense (ou voit les situations) et d’essayer des moyens alternatifs de parvenir à une réduction dans l’excitation émotionnelle ou les symptômes physiques et une augmentation dans sa confiance en soi à gérer les situations stressantes. Ces objets et effets attendus se situent en plein dans le champ du processus éducatif, qui s’étend ici à la prise de conscience par le patient de ses perceptions, sentiments et modes d’action. La sensibilisation (éducation par le retour sur soi, l’examen de son vécu…) est le moyen éducatif généralement utilisé pour aider à la prise de conscience.
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Biofeedback, relaxation, hypnose et imagerie Techniques moins fréquentes que les précédentes, elles comportent aussi une part d’apprentissage de la part du patient. Le biofeedback utilise généralement un instrument de surveillance afin de donner au patient des informations physiologiques dont il n’est généralement pas conscient. Sur le plan éducatif, il contribue à aider le patient à apprendre, non seulement à faire, mais à comprendre. La relaxation vise un contrôle du stress, aussi bien comme facteur causal que comme facteur d’aggravation de la douleur. Elle agit sur la tension musculaire, contribuant ainsi à contrôler la douleur, le stress émotionnel, l’estime personnelle, la tendance dépressive et le niveau d’activité, et sur le sentiment de contrôle engendré par l’apprentissage d’un moyen autonome de gestion de la douleur [21]. Méthodes de réhabilitation physique Les traitements utilisés dans la réhabilitation physique comprennent le stretching, les exercices et la remise en forme (pour améliorer la force, l’endurance et la souplesse), l’entraînement de la démarche et du maintien postural, et l’ergonomie et les mécanismes corporels [16]. L’exercice est un composant important de la gestion de toutes les conditions chroniques, et il inclut d’office une part d’apprentissage, tant de techniques que d’organisation ou de motivation, etc. et donc d’éducation du patient. Les modalités physiques comprennent également d’autres techniques, qui font moins appel à la participation du patient, ou à ses actions personnelles propres (la simple application de froid ou chaud, les ultrasons, la diathermie, la stimulation électrique, la neurostimulation transcutanée (TENS), l’acupuncture, l’auriculothérapie, etc.) Approches multidisciplinaires L’utilisation de plusieurs stratégies thérapeutiques, simultanément, est le résultat des essais d’approches multidisciplinaires, chaque stratégie ayant ses origines dans une discipline clinique et un mode d’explication des actions et réactions des patients. La création de « centres de la douleur » ainsi que des programmes multidisciplinaires de gestion de la douleur a accéléré le développement d’approches combinées multistratégies. En Europe, les premiers « centres de la douleur » se sont ouverts dès 1963 en Italie et dix ans plus tard en Belgique, mais l’approche multidisciplinaire n’y est intervenue respectivement qu’en 1979 pour l’Italie et en 1974 en Belgique. Pour la « Joint Commission » [16], un programme type de gestion de la douleur chronique comprend un diagnostic médical, une évaluation du fonctionnement physique, une évaluation psychosociale, une thérapie pharmacologique,
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une réhabilitation physique, de l’éducation du patient, et des approches psychologiques appropriées (par exemple, relaxation, biofeedback, entraînement des capacités à faire face, psychothérapie).
Lombalgies chroniques et Écoles du dos : archétype de l’approche multidisciplinaire et multiprofessionnelle et des malentendus conceptuels Alors que les causes et les facteurs d’influence multiples (contextuels, cognitifs, comportementaux, sociaux, professionnels, psychologiques…) des lombalgies chroniques sont bien connues depuis longtemps, on constate une forte disparité dans les conceptions qu’ont les Écoles du dos de l’éducation du patient. Plusieurs se limitent à des apprentissages ergonomiques « d’économie du dos », de savoir anatomophysiologique, d’acquisitions de savoir-faire et de trucs favorisant un maintien adéquat… sans agir sur les conditions cognitives multiples, sur les facteurs psychosociaux, ou encore sur le contexte (surtout dans les lombalgies d’origine professionnelle). Des échecs (ou réussites limitées) découlent des programmes de ce type, y compris en milieu hospitalier et de soins, avec comme publics des professionnels de santé qui ne font pas mieux que les patients habituels. Henrotin et al. [15] relèvent que les contenus abordés dans les Écoles du dos, en Belgique, sont : l’anatomie, la biomécanique vertébrale, les causes et traitements du mal de dos et les principes d’économie rachidienne. L’aspect psychologique et l’ergonomie ne sont abordés de façon spécifique que dans 35 % des cas, alors qu’un programme d’exercices pour le dos est inclus dans 80 % des programmes. En outre, ces « Écoles » sont souvent standardisées, c’està-dire proposées à tous les patients concernés, de la même manière, et sans adaptation personnelle. Pourtant, plusieurs éléments complémentaires de contenu sont particulièrement recommandés par certains auteurs.
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Développer un programme quotidien d’activités d’autogestion et d’exercice physique, les processus de coping, l’efficacité personnelle et la résolution de problèmes [29] ; mettre l’accent sur l’apprentissage de stratégies de coping, afin d’évaluer la façon dont les patients les mettent en application et avec quel degré de confiance ils le font, d’étendre le répertoire des choix de coping des individus en étendant les options de gestion de la douleur (exercice, autodéclaration cognitive, modification d’activités et d’horaire, relaxation), de diminuer les cognitions négatives de coping (comme la catastrophisation), d’augmenter la confiance dans le contrôle sur les exacerbations de la douleur [20] ;
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inclure une éducation à propos du coping et des stratégies efficaces de la douleur et des mécanismes de douleur, dont on a déjà montré qu’elle permettait d’augmenter efficacement les capacités des patients, une éducation sur la signification et les différences entre les composantes affectives et sensorielles de la douleur, des informations à propos de la relation entre les stratégies de coping et les médicaments pour la douleur, ainsi que sur la façon dont on peut utiliser des mécanismes de coping positifs plutôt que négatifs [14] ; intégrer des contenus de métaconnaissance et de savoirfaire : se connaître et connaître les différentes composantes du phénomène douloureux telles qu’elles se manifestent individuellement (comprenant les dimensions physiques, psychologiques et sociales), connaître et savoir appliquer différents moyens de soulager la douleur, à adapter en fonction du type de douleur, savoir appliquer et adapter son traitement en partenariat avec son médecin, savoir quand faire appel au médecin (par exemple, quand une douleur inconnue dure, quand un traitement n’est pas ou plus efficace…) et établir une relation de confiance et un partenariat avec lui, connaître le bon usage des médicaments prescrits et non prescrits et comprendre leur bien-fondé et leurs limites [7].
De telles recommandations élargissent le champ des contenus éducatifs à aborder dans les Écoles du dos. Elles intègrent les enseignements de la prise en charge d’autres problèmes de santé chroniques à la gestion de la douleur chronique, en prévoyant d’agir sur les facteurs cognitifs, psychologiques, mais aussi psychosociaux et contextuels.
Éducation thérapeutique du patient dans la douleur chronique On le voit, les approches de type psychologique, comportemental, ou même médical (pharmacologique) comprennent presque toutes un ou des volets impliquant « une part d’apprentissage de la part du patient », ce qui correspond à la définition reconnue de l’éducation du patient. La question est de comprendre de quelle part il s’agit, et quelle vision de l’éducation sous-tend ces approches. C’est d’autant plus important que bon nombre de ces aspects d’apprentissage (ou d’éducation) ne semblent pas reconnus par les professionnels comme « éducatifs », la meilleure preuve étant que l’éducation des patients est considérée comme une des stratégies thérapeutiques de la douleur chronique, placée aux côtés de celles citées ci-dessus. Comme telle, elle est définie avec une certaine précision, et ses contenus et méthodes décrits. En même temps, des activités d’apprentissage sont mentionnées dans les autres stratégies thérapeutiques, montrant une confusion dans ce qui est considéré comme éducatif ou non.
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Souvent classée sous l’intitulé « méthodes psychopédagogiques », l’éducation consisterait à aider les patients à acquérir les savoirs et savoir-faire à propos de la maladie et des traitements, ainsi que de la gestion de la douleur (par exemple, apprendre aux patients ce qui peut aggraver ou soulager la douleur) [16]. L’éducation du patient est considérée comme un aspect très important dans la prise en charge. Selon Goldenberg et al. [13], l’aspect le plus important dans la réussite de la gestion de la fibromyalgie est l’éducation du patient. Selon Wilder-Smith et al. [32], l’éducation, souvent identifiée comme un problème majeur dans le contexte de la douleur chronique, est en fait un élément crucial dans la gestion efficace de telles douleurs. Les patients manquent d’informations sur la douleur et les pathologies sous-jacentes, sur la façon de l’exprimer et de l’évaluer, ainsi que sur les possibilités thérapeutiques [7]. Par exemple, dans le cadre de la gestion des médicaments, les patients ont besoin d’éducation pour comprendre que les opiacés à longue durée d’action ne doivent pas être utilisés de la même manière que les produits à action courte [22]. L’analyse de 31 programmes de « gestion de la douleur chronique » révèle une étrange richesse, à la fois disparité et variété, de leurs composantes.
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Certains auteurs [1] identifient deux sortes d’objectifs : éducatifs (augmentation des connaissances et acquisition de compétences) et psychoéducatifs (pédagogie, coping et thérapies comportementales). Cette distinction tend à laisser croire que les aspects psychologiques et psychosociaux ne font pas partie de l’éducation mais d’une intervention hybride, alors que le concept même d’éducation du patient inclut les actions d’information, de formation, d’apprentissage et d’aide psychologique et sociale » [8,33]. Contenus éducatifs On retrouve entre autres les contenus suivants dans les stratégies dites éducatives :
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Objectifs On retrouve régulièrement les objectifs suivants, que nous reclassons dans les catégories correspondantes de facteurs d’influence des comportements d’autosoins :
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cognitifs : stimuler la compréhension de la douleur chronique et ses manifestations physiques, psychiques et sociales, se connaître et connaître ses réactions face à la douleur, connaître et savoir appliquer différents moyens de soulager la douleur, à adapter en fonction du type de douleur, savoir appliquer et adapter son traitement, savoir quand faire appel au médecin, connaître le bon usage des médicaments prescrits et non prescrits ; psychologiques : augmenter le sentiment de contrôle sur la douleur, comprendre le vécu émotionnel de la douleur [9], comprendre ses propres processus de coping et d’adaptation ; psychosociaux : renforcer le sentiment d’efficacité personnelle ; contextuels et d’interaction : établir une relation de confiance et un partenariat avec les soignants ; comportementaux : améliorer le fonctionnement du patient, renforcer les comportements d’autogestion (gestion de la douleur, du stress, etc.), diminuer l’utilisation des soins de santé, favoriser l’adoption d’un rôle actif des patients dans la gestion de leur douleur, renforcer les com-
portements positifs face à la douleur, diminuer l’utilisation des médicaments non indispensables ; de santé (biopsychosociale) : soulager la douleur, améliorer la qualité de vie des patients, améliorer le bien-être psychologique.
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savoirs théoriques et pratiques : anatomie fonctionnelle et physiopathologie, connaissance de la maladie, principes et méthodes d’évaluation de la douleur, connaissance des médicaments ; savoir-faire d’autosoins : techniques d’autogestion de la douleur et de stratégies de coping (activités agréables, divertissements cognitifs, imagerie, visualisation…), techniques de résolution de problèmes, informations à propos de la douleur (physiopathologie, etc.) et/ou des maladies chroniques associées, relaxation, yoga, méditation, exercices physiques, kinésithérapie, protection articulaire, réactions et gestion des crises et épisodes aigus, gestion de la dépression, soutien psychologique, principes de self-help et de selfcare, conseils sociaux et économiques (impact de la douleur sur le travail et la vie familiale), évaluation des capacités professionnelles, discussion des attitudes et croyances erronées, restructuration cognitive, modification des comportements liés à la douleur, biofeedback, hypnothérapie, gestion et utilisation des médicaments, gestion du sommeil, de la fatigue et de l’alimentation ; savoir-faire personnels (métasavoirs) et relationnels : vécu émotionnel de la douleur, capacités d’expression et de communication, établir un contrat thérapeutique et se fixer des objectifs, modification des pensées et sentiments liés à la douleur, relation médecin–patient, activités sociales et fonctions et rôles sociaux.
Ici encore, la diversité des facteurs d’influence du comportement face à la douleur est bien couverte par la variété des contenus identifiés. Toutefois, aucun programme de gestion de la douleur incluant un volet éducatif n’aborde tous les facteurs et donc tous les contenus.
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Le dosage respectif des différents contenus varie grandement d’un programme à l’autre. Cette observation est également relevée par d’autres auteurs. Legrand et Audran [18] ont analysé le contenu des programmes thérapeutiques pluridisciplinaires conçus pour des patients lombalgiques. Ils observent que le « menu thérapeutique » varie en fonction des centres de prise en charge de la douleur, en particulier dans la part respective des mesures physiques, éducatives, comportementales et cognitives. Parfois enfin, la difficulté d’éviter les contradictions entre objectifs et contenus apparaît : viser « la modification de fausses croyances » en travaillant sur les croyances et les représentations, tout en s’appuyant sur une « alliance thérapeutique », qui par définition reconnaît la réalité du vécu du patient, sans la rapporter à celle du soignant [27]. Vouloir modifier les fausses croyances reviendrait-il à faire du soignant la seule référence ? Lorsqu’ils sont appréhendés ensemble, ces contenus variés relèvent d’une approche globale, véritablement multidisciplinaire, qui cherche les causes et donc les réponses dans différents cadres théoriques issus de la psychologie de la santé, de la sociopsychologie, de la communication sociale, de l’anthropologie, ou encore de la pédagogie et de l’andragogie (pédagogie des adultes), et non dans un seul. Méthodes et moyens éducatifs L’organisation pratique des programmes analysés est très variable. La durée des programmes est généralement assez étendue : elle varie de 4 à 24 semaines (6 à 12 semaines en moyenne). Le nombre de sessions varie de 4 à 12. Dans certains programmes, le nombre de sessions varie en fonction des besoins du patient. La fréquence est également très variable, allant de rencontres quotidiennes à des sessions mensuelles, parfois en fonction des besoins individuels. Legrand et Audran [18] observent également cette variabilité dans le nombre de sessions composant les programmes. Ils observent que certains programmes sont réalisés en ambulatoire ou au cours d’hospitalisations, et comportent parfois plusieurs séances courtes pendant un à deux mois, et parfois des entraînements intensifs : cinq à six heures par jour, sur plusieurs semaines. Enfin, les activités se font généralement en petits groupes. Le nombre de participants est en moyenne de six à dix personnes. Certains programmes proposent en plus des séances individuelles. Un seul programme est constitué principalement d’interventions individualisées complétées d’une approche collective de groupe, dans un cadre de prévention secondaire auprès de personnes à risque de chronicisation [25]. On observe ainsi que, si peu de programmes offrent des possibilités de personnalisation dans les contenus et les objectifs, certains les intègrent dans le dispositif (en associant interventions individuelles et de groupe) ou encore
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dans la planification (en variant la durée et la fréquence de la participation des patients). Les méthodes d’apprentissage utilisées sont souvent actives et font appel à une participation du patient, du moins au niveau de l’exécution et du déroulement : jeux de rôle, discussions, groupe de résolution de problèmes (apportés ou non par les patients eux-mêmes), groupes de parole et d’échange de vécu, apprentissage pratique de certaines techniques… Elles incluent également divers outils que les patients peuvent utiliser en session ou chez eux : guide de self-help, manuel de traitement, brochures d’information, cassette audio avec des exercices de relaxation, etc. Les intervenants sont généralement des professionnels de santé : infirmières spécialisées, kinésithérapeutes, travailleurs sociaux, anesthésistes, psychologues, médecins généralistes, psychiatres, ergothérapeutes, médecins spécialistes… Le rôle des médecins généralistes est particulièrement mis en évidence, malgré la difficulté qu’ils rencontrent à intégrer l’accompagnement dans le temps des consultations, mais avec l’avantage de la continuité dans le temps : « faute de temps, le généraliste bénéficie de la durée » [12]. Une seule publication mentionne le rôle de « patientsexperts » comme coéducateurs [1]. Contrairement à d’autres domaines de maladies chroniques, les associations de patients ne semblent pas participer à ces programmes éducatifs ni directement (animation ou coanimation) ni indirectement (sollicitation à distance, fourniture d’outils d’information, aide à l’élaboration des programmes et identification des problèmes et besoins des patients…). La contradiction est marquée entre d’une part les déclarations mettant en évidence l’expertise et la compétence des patients pour exprimer la douleur et la gérer (besoin de centrer la thérapeutique sur le patient et de reconnaître la réalité de sa subjectivité) et d’autre part l’absence des patients, comme personnes ou comme groupes, dans la définition de leurs besoins éducatifs et des interventions appropriées.
Conclusions et pistes Tenir compte de la diversité des facteurs d’influence des comportements d’autosoins des patients La recherche a permis d’identifier plus de 20 modèles explicatifs, d’origines disciplinaires différentes, des comportements des patients devant des problèmes de santé de longue durée, ainsi que plus de 50 facteurs d’influence de ces comportements [8], provenant tant des patients que des soignants ou encore des facteurs de contexte ou d’accessibilité des comportements. Chez les patients, tous les facteurs, sanitaires, sociaux, psychologiques, cognitifs, psychosociaux, culturels devraient être envisagés dans l’élaboration
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des programmes et stratégies thérapeutiques et éducatifs, quitte à les pondérer en fonction de leur importance pour chaque patient. Les représentations sociales de la santé, de la maladie, de la douleur, des rôles de soignant et de soigné devraient être abordées, en particulier en raison de leur place par rapport aux croyances de santé. Si les croyances se conçoivent en termes de vrai ou faux et appellent des corrections, les représentations existent comme un ensemble de savoirs, de perceptions et d’images d’origine scientifique, d’expériences personnelles ou vicariantes (par le vécu d’autrui), et comme telles ne peuvent être ni réfutées ni ignorées, d’autant plus qu’elles influencent clairement les comportements d’autosoins et ceux de motivation à apprendre et à participer (par l’empowerment). Renforcer et utiliser pleinement la multidisciplinarité Si un des risques d’une vision étroite de la multidisciplinarité est d’empêcher l’intégration de stratégies variées, il apparaît nécessaire d’associer des professionnels des autres disciplines concernées, au moins dans la conception des programmes (ou de leur partie éducative) sinon dans les interventions auprès des patients : pédagogues (processus d’apprentissage, utilisation de l’erreur, importance du sentiment de certitude dans la mise en place de nouveaux comportements…), psychologues sociaux (travail sur les représentations, au-delà des croyances et des attitudes), spécialistes de l’approche socioanthropologique (enjeux des contextes et cadres de vie, des interactions sociales et professionnelles, d’une vision systémique de la douleur chronique)… De même, comme l’exemple d’autres problèmes de santé chroniques l’a montré, serait souhaitable l’intégration des patients, personnes, groupes ou associations, à la conception et l’application de programmes, en commençant par l’identification de leurs besoins d’information et d’apprentissage, et des contenus à aborder (la douleur, la vie, le sens et l’attribution causale, etc.). Former et varier les compétences professionnelles Certains programmes analysés précisaient que leurs intervenants avaient reçu une formation préalable. Toutefois, très peu de publications mentionnent la nature de ces formations et leurs contenus. Pourtant, il est clair que les compétences des soignants et des intervenants interviennent dans la réussite des programmes et donc dans l’efficacité thérapeutique. La multidisciplinarité, par exemple, semble s’exercer par l’association de professionnels de disciplines variées, quoique limitées. En réalité, le risque est de se limiter à fonctionner en parallèle, par juxtaposition, sans comprendre le sens et la place des interventions (et donc d’abord des modè-
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les diagnostiques et thérapeutiques) des autres intervenants. Une formation devrait inclure donc une base commune, un socle permettant de comprendre la place des autres disciplines, afin de construire chacun sa place propre dans un ensemble cohérent. Steen et Haugli [28] ont démontré l’importance pour les soignants de prendre conscience qu’ils ne sont plus dans une « médecine de l’aigu », où l’objectif est la guérison, et qu’ils n’ont pas « les bonnes réponses » à fournir, mais qu’ils ont un rôle de facilitateur dans l’expression du vécu du patient afin de l’aider à trouver des réponses qui lui sont personnelles. Leur rôle comme soutien social (soignant) est également très important pour aider le patient à poursuivre son traitement et surtout les exercices physiques recommandés [3]. Il y a donc une place majeure dans la formation des soignants à l’utilisation de principes pédagogiques tels que la reconnaissance et la valorisation de l’erreur dans l’apprentissage, comme passage obligé, voire comme un renforcement (tant chez les patients que chez les soignants). Un autre thème indispensable est celui du modèle d’intervention : en sciences de la santé, toute intervention est fondée sur une démarche de résolution de problème, c’est-à-dire d’un événement ou d’un phénomène non souhaité, non désiré, négatif, qu’il faut résoudre. Cela passe par une démarche en deux temps : diagnostiquer ce qui ne va pas et prescrire la réponse thérapeutique appropriée. Dans les maladies chroniques, un troisième temps est identifié, celui du suivi, de l’accompagnement du patient dans la durée. Apprendre à sortir de ce modèle, sans le rejeter, est un apport des sciences de l’éducation, qui démontrent que l’on peut intervenir, et donc aussi éduquer, en l’absence de problème, et que la résolution d’une partie d’un problème ne dispense aucunement de continuer à s’y intéresser, sous la forme d’objectifs de maintien des acquis de santé nouveaux, de renforcement, voire d’utilisation des réussites comme leviers, comme ressources propres du patient, pour des étapes prochaines. L’éducation du patient peut prendre de nombreuses formes, dont certaines capables d’apporter une réelle plus-value aux approches thérapeutiques de la douleur chronique, à la condition de correspondre aux critères de qualité identifiés dans les recommandations internationales [33], et de s’appuyer sur une relation de soins (médecin–malade ou soignant–soigné) de qualité, respectant les besoins des uns et des autres, associant le patient dans la démarche thérapeutique, non comme destinataire de soins et de recommandations, mais aussi comme codécideur, comme partenaire d’une relation duelle dont il serait l’acteur principal, avec ses compétences et expérience personnelles, complétant l’expérience et l’expertise des soignants. Conflit d’intérêt : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt.
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